Le réalisateur canadien David Cronenberg serait allé jusqu'à amputer son film de deux scènes à connotation sexuelle pour s'assurer de la présence de Keira Knightley au générique de son film A Dangerous Method. La comédienne n'a pas abusé de son pouvoir et s'est pliée au jeu.

C'était il y a six ans. Keira Knightley avait brièvement rencontré David Cronenberg. Une audition d'une vingtaine de minutes. Cela n'avait débouché sur rien. «Mais ç'avait été très agréable», se rappelle la comédienne anglaise. Bref, elle n'en rêvait pas moins de jouer devant la caméra du cinéaste. Et un jour, coup de fil de son agent. David Cronenberg avait un rôle pour elle. «J'étais sûre à 99% que j'allais accepter sans même savoir de quoi il s'agissait. J'ai reçu le scénario, je l'ai lu et j'ai dit: Wow!», a-t-elle confié à La Presse lors d'une entrevue accordée à Toronto.

«Mais il y avait ces deux scènes de sexe. Je ne savais pas si je pouvais les faire, ni si je voulais les faire.»

Keira Knightley a donc appelé le réalisateur, lui a dit combien elle l'aimait, combien elle aimait son travail et combien elle aimait le scénario. Puis, elle lui a fait part de ses réserves. «Il m'a répondu que ce serait une tragédie si je n'acceptais pas le rôle et qu'il allait couper les deux scènes problématiques pour s'assurer de ma présence.»

Il n'en fallait pas plus pour ouvrir la discussion entre eux. David Cronenberg a expliqué que les scènes en question ne devaient pas être sexy ou torrides, mais impersonnelles et cliniques. Keira Knightley a conclu que ça, elle pouvait. Et elle voulait.

Entre Michael Fassbender en Carl Jung et Viggo Mortensen en Sigmund Freud, elle incarne ainsi Sabina Spielrein dans A Dangerous Method. Née dans une famille juive de Russie, elle deviendra l'une des premières femmes psychanalystes. Mais aussi, la maîtresse de Jung dont, au départ, elle était la patiente. Car elle souffrait d'hystérie grave. C'était le diagnostic officiel. «Elle se voyait comme possédée, démoniaque. Elle avait ces pulsions que la poussaient à la masturbation et au sadomasochisme.»

Keira Knightley a découvert cela en lisant les écrits de Sabina Spielrein, dont elle ne savait rien au départ, comme la plupart des gens. Elle a aussi discuté avec le scénariste Christopher Hampton, avec qui elle a collaboré pour Atonement. Et, quand est venu le moment de se préparer à jouer, elle est revenue au démon, à l'animal. S'exerçant devant le miroir, tordant sa bouche, avançant la mâchoire jusqu'à en devenir prognathe à volonté. «J'ai skypé avec David pour lui montrer le résultat, il a aimé.»

Elle a ensuite travaillé son accent selon ses directives, un mélange de «mid-Atlantic» et de russe. Et elle a plongé. Dans les grimaces et dans les fameuses scènes de sexe. Qui, en effet, tiennent plus de la maladie que de la sensualité. Et que David Cronenberg a tournées... façon Cronenberg. «Une des raisons pour lesquelles j'aime ses films, c'est la nature explicite et choquante de son travail. En tant qu'acteur, vous avez à savoir ce que vous voulez, vous embarquez ou pas.» Elle, elle a finalement embarqué. À fond.

A Dangerous Method (Une méthode dangereuse) prend l'affiche le 13 janvier.