Comme la famille, les amis et le travail, la maison constitue un point d'ancrage dans la vie d'un être humain. Lorsque ce point d'ancrage disparaît du jour au lendemain, avec un consentement tout relatif, cela crée une onde de choc, un impact et bien souvent des stigmates.

C'est ce sujet qu'explore le jeune réalisateur Simon Plouffe dans son documentaire (et premier film) L'or des autres, consacré à l'ouverture de la mine d'or Osisko à Malartic, en Abitibi-Témiscamingue.

«Mon film met beaucoup l'accent sur la maison comme lieu de mémoire, comme un patrimoine, dit-il en entrevue. Pour tous ces gens, la résidence est bien davantage un patrimoine qu'un ensemble matériel.»

Ce sentiment, très fort en région, perce à travers les commentaires formulés par la dizaine de personnes que Plouffe a suivies durant les trois ans de tournage de son film. «J'ai vu ma maison passer en lambeaux, dans des containers», dit un déraciné de Malartic dans un courriel envoyé à ses frères et soeurs.

Le projet de mine à ciel ouvert a permis la création de 465 emplois dans ce village de 3640 habitants. Gravement frappés par le chômage, Malartic et la majorité de ses habitants ont ouvert les bras à Osisko à l'annonce du projet, au milieu des années 2000. Mais cela s'est aussi traduit par le déménagement d'un quartier complet comptant 205 résidences, deux écoles, deux résidences de retraités et une garderie.

Cette façon de faire a abasourdi M. Plouffe. Originaire de Rouyn-Noranda, il estime (comme il s'emploie à le démontrer avec Thetford Mines dans son film) que l'arrivée d'une société minière n'apporte qu'une embellie passagère dans la vie économique d'une ville ou d'une région. «La première fois que j'ai entendu parler du projet, je me suis demandé si c'était un canular, dit-il. Tout cela semblait absurde, comme si on n'avait pas appris du passé.»

Si l'auteur ne nie pas l'effet de prospérité qu'a entraîné le projet, il estime tout de même que les gens qui l'ont contesté ou qui ont, avec le temps, regretté les négociations avec la société minière n'ont pas eu leur juste part de parole. «On a oublié cette déception chez les gens, dit-il. Au début, lorsque Osisko a négocié le déménagement des maisons, plusieurs l'ont fait sous d'énormes pressions et ont regretté d'avoir accepté les offres. D'autres personnes ont réussi à obtenir un prix plus intéressant, mais au terme de deux ans de négociations.»

Présenté en novembre dernier aux Rencontres internationales du documentaire de Montréal, L'or des autres est arrivé à peu près en même temps qu'un autre film sur le même sujet (La règle d'or de Nicolas Paquet) et que Trou story, de Richard Desjardins et Robert Monderie. «La question des ressources naturelles est dans le vent, dit Simon Plouffe pour expliquer cette convergence. Et on peut, par le documentaire, se pencher plus longuement sur un sujet qu'à travers un reportage dans les médias.»

Le film, qui sera projeté un peu partout au Québec dans les prochaines semaines, fera aussi sa rentrée européenne les 9 et 10 février au Festival international du film d'environnement, à Paris. Il sera également présenté dans des festivals au Texas et au Montana et sera diffusé à la SRC et à RDI.

L'or des autres sera présenté à l'Excentris à compter du 20 janvier.