On savait que la boxe était une métaphore de la vie - Rocky nous l'a bien enseigné. Ce qu'on ne savait pas, c'est que la boxe était aussi une métaphore de la Chine moderne. C'est du moins ce que suggère China Heavyweight, nouveau documentaire du Canadien Yung Chang, qui est présenté cette semaine au festival du film indépendant de Sundance.

Le cinéaste d'origine chinoise s'est fait remarquer en 2008, avec le brillant Up the Yangtse, lauréat de nombreux prix internationaux. Avec China Heavyweight, le Montréalais d'adoption explore plus avant cette Chine en mutation, qui vit actuellement son propre rêve américain... pour le meilleur et pour le pire.

L'histoire? Dans le sud-ouest du pays, région pauvre du Sichuan, une école de boxe recrute de jeunes campagnards dans l'espoir d'en faire des champions. D'espoirs en désillusion, ceux-ci découvriront que le succès n'est pas à la portée de tous et que le rêve ne suffit pas toujours à tromper son destin.

Au-delà des clichés

Victoires, coups durs, persévérance: a priori, China Heavyweight pourrait ressembler à beaucoup de films sur la boxe. Mais Yung Chang ose croire que son documentaire va plus loin que les habituels clichés reliés à l'univers du ring.

«Je ne voudrais pas avoir l'air trop intello, mais ultimement, je voulais me servir de ce sport pour montrer à quel point le pays est en train de changer, lance le cinéaste, rejoint lundi à Park City, Utah. Les jeunes s'en servent comme voie rapide vers le succès. Ils ne veulent plus prendre la longue route, comme leurs parents avant eux.»

Fait à noter: la boxe connaît présentement un gros regain d'intérêt en Chine, après avoir été bannie de 1959 à 1987 parce qu'on la jugeait trop «capitaliste», trop «violente» et trop «individualiste». Selon Yung Chang, voilà un autre signe évident que le pays est en train de changer. Mais attention, dit-il, à ce que la Chine ne s'enivre pas trop de son occidentalisation fulgurante. «Si j'ai un message à livrer, lance le cinéaste, c'est que les Chinois doivent y aller mollo. Ils vont peut-être bientôt dominer le monde. Mais ils doivent accepter l'idée de l'échec et comprendre que cela peut aussi faire partie de l'équation.»

China Heavyweight a été présenté dimanche soir en grande première à Sundance, en présence du «coach» Qi Moxiang, personnage mémorable du documentaire. Or, selon Yung Chang, le choc culturel s'est avéré assez grand pour ce dur à cuire, qui n'était encore jamais sorti d'Asie: «Il y a beaucoup d'émotion dans l'air, dit-il, mais il s'adapte tranquillement: hier, il a mangé son premier burrito!»

À noter que trois films canadiens figurent cette année parmi les 12 documentaires en compétition à Sundance, une première depuis 2008. Outre China Heavyweight, les autres élus sont Payback de Jennifer Baichwal et Indie Game: The Movie, de James Swirsky et Lisanne Pajot, un documentaire sur le monde schizophrénique des créateurs de jeux vidéo.

China Heavyweight doit prendre l'affiche en mai au Québec. Sundance se termine samedi.