En revoyant Titanic 20 ans plus tard, sans jamais l'avoir revu depuis sa sortie, le verdict reste le même: James Cameron a réalisé un beau et grand film populaire, qui mérite à coup sûr sa place dans l'histoire du cinéma.

Le pari du romantisme

Pour vendre l'idée de son film au studio Fox, James Cameron a dit qu'il voulait faire un «Roméo et Juliette sur le Titanic». C'est exactement ce qu'il a (bien) fait. Si cette superproduction est d'une telle efficacité, c'est en effet grâce à l'histoire d'amour entre Rose Dewitt Bukater, une jeune fille de 17 ans issue d'une famille bourgeoise, et Jack Dawson, un jeune artiste sans le sou. Les deux premières heures du film sont d'ailleurs consacrées à l'évocation de cet amour, d'autant plus déchirant que le destin - tragique - s'en mêlera. Quand Rose s'abandonne en fermant les yeux dans les bras de son amoureux, à la proue du navire, il est bien difficile d'opposer la moindre résistance. On s'émeut de nouveau quand les yeux de la centenaire racontant son histoire retrouvent l'éclat de la jeunesse. À moins d'avoir un coeur de pierre, comment ne pas craquer?

Le faste d'une époque

Titanic évoque aussi une époque où le luxe s'exprimait d'une autre façon. Ainsi, le spectateur est plongé dans un décor d'avant-guerre somptueux, minutieusement reconstitué par les artisans du film. Pour les privilégiés qui avaient accès au traitement royal - c'était le cas de la famille de Rose - la traversée s'effectuait dans des conditions exceptionnelles, que Cameron a su traduire grâce au gigantisme de sa mise en scène. Cela dit, le cinéaste a aussi su faire écho à la lourdeur des conventions sociales, ainsi qu'à la lutte des classes en évoquant le traitement honteux - surtout en temps de crise - auquel étaient soumis ceux qui n'avaient pu faire mieux que d'obtenir un billet de troisième classe. C'est pourtant là qu'étaient organisés les meilleurs partys...

Leo et Kate

Avant Titanic, Kate Winslet, 21 ans au moment du tournage, s'était déjà fait remarquer des cinéphiles grâce à Heavenly Creatures, un film de Peter Jackson. Leonardo DiCaprio, 22 ans, avait été cité aux Oscars quatre ans plus tôt, grâce à sa remarquable performance dans What's Eating Gilbert Grape (Lasse Hallström). Les deux jeunes acteurs - devenus superstars grâce à Titanic - ont plongé à fond dans l'aspect romantique de l'histoire et nous y ont fait croire. Les échos shakespeariens de cet amour imprévu (Rose était à bord du Titanic avec sa famille et son fiancé - Billy Zane - pour aller convoler en justes noces aux États-Unis) nourrissent aussi notre empathie envers ces deux êtres visiblement destinés à se rencontrer. Objectivement, les deux acteurs ont eu des rôles beaucoup plus complexes que ceux-là à défendre dans leur carrière, mais ils forment néanmoins à l'écran l'un des plus beaux couples de cinéma.

Comme si on y était

La technologie des images de synthèse a évolué à la vitesse grand V depuis 20 ans, mais les effets visuels de Titanic restent encore aujourd'hui de très belle tenue. Le pari de James Cameron était de faire ressentir au spectateur le naufrage comme s'il était lui-même à bord du paquebot et cette sensation est toujours bien présente. Chacun ira de sa scène la plus «éprouvante», mais celle où - attention au divulgâcheur!!! - le paquebot se brise en deux alors que l'arrière se dresse à la verticale pour ensuite plonger dans l'océan comme un ascenseur en folie, reste sans doute l'une des plus fortes de l'ensemble. Et puis, le fait que James Cameron intègre au récit des images de la véritable épave du navire, qu'il a lui-même filmées, ajoute au caractère poignant de cette histoire.

La chanson de Céline

Bien entendu, les 3 milliards de passages de My Heart Will Go On à la radio, dans les centres commerciaux, les ascenseurs, les cabinets de dentistes et les karaokés d'inspiration japonaise seront vite venus à bout de notre patience. Le fait est, pourtant, que la chanson phare du répertoire de Céline Dion est magnifique. Et traduit parfaitement l'état d'esprit d'un film au cours duquel le motif musical, signé James Horner, est entendu à quelques reprises. Rappelons-nous aussi à quel point le Québec entier a retenu son souffle à la cérémonie des Oscars quand notre diva nationale s'est exécutée dans une robe bleue océane, en arborant le collier Le coeur de l'océan, fabriqué à grands frais, sur lequel elle a frappé allègrement, dans un geste qui n'appartient qu'à elle. On n'oubliera jamais.