À la lumière de révélations faites au cours des récentes années, ou tout simplement parce que les codes moraux changent au fil des époques, il devient parfois plus difficile pour les cinéphiles de garder un regard neutre sur des films qui ont pourtant marqué l'histoire. En voici quelques exemples célèbres.

Le dernier tango à Paris, Bernardo Bertolucci

Ce film de Bernardo Bertolucci a fait scandale lors de sa sortie, en 1972, à cause des scènes de nature sexuelle.

Des années plus tard, le scandale a emprunté une forme plus troublante. Dans une interview en 2013, le cinéaste a en effet révélé que la scène de viol ne figurait pas dans le script.

En fait, Marlon Brando et lui l'avaient préparée, mais Maria Schneider, alors âgée de 19 ans, n'en a été informée qu'au moment de tourner.

L'actrice, morte en 2011, a déjà confié s'être sentie «humiliée» et «un peu violée».

Les valseuses, Bertrand Blier

En 1974, ce long métrage de Bertrand Blier fut autant adulé que décrié.

Avec son irrévérence très assumée, le film a atteint son objectif de «choquer le bourgeois» en proposant un langage et des scènes de sexe crus traduisant la vision très machiste des deux protagonistes.

Ce film, qui a lancé les carrières de Gérard Depardieu, Patrick Dewaere et Miou-Miou, appartient résolument à une autre époque.

Photo d’archives

Patrick Dewaere et Gérard Depardieu dans Les valseuses

Manhattan, Woody Allen

Souvent considéré comme l'un des plus grands films de Woody Allen, Manhattan n'en suscite pas moins maintenant un certain malaise.

Réalisée en 1979, cette comédie sentimentale relate une relation amoureuse entre un homme de 42 ans, interprété par Woody Allen lui-même, et une jeune fille de 17 ans (Mariel Hemingway).

Compte tenu de toutes les histoires ayant entouré la vie personnelle du cinéaste - les allégations d'inconduite sexuelle n'ont jamais été reconnues par les instances judiciaires, cela dit -, il devient quand même difficile d'en faire abstraction à titre de spectateur.

Photo d’archives

Mariel Hemingway et Woody Allen dans Manhattan.

L'oeuvre de Roman Polanski

Même si, The Pianist mis à part, ses films n'évoquent pas directement sa vie, l'oeuvre de Roman Polanski est-elle entachée par les scandales?

Chaque cinéphile tranchera lui-même la question, mais le fait est que le passé de l'homme, qui a lui-même reconnu avoir eu une «relation sexuelle illégale» avec une adolescente de 13 ans à Los Angeles en 1978, est accablant.

Ainsi, toutes les marques de reconnaissance que le milieu du cinéma français lui rend régulièrement sont vivement contestées.

La rétrospective que lui consacre présentement la Cinémathèque française a d'ailleurs suscité un tollé. L'institution a toutefois maintenu l'événement à son programme.

PHOTO ARCHIVES AP

Roman Polanski

La vie d'Adèle, Abdellatif Kechiche

En 2013, la Palme d'or du Festival de Cannes a été attribuée à l'unanimité, par un jury présidé par Steven Spielberg, à La vie d'Adèle.

L'euphorie fut toutefois de courte durée. Dans les semaines qui suivirent, les deux actrices, Léa Seydoux surtout, ont dénoncé les méthodes utilisées par Abdellatif Kechiche pendant ce tournage «horrible».

La réplique du cinéaste fut aussi cinglante. Cette navrante polémique a forcément entaché la carrière du film.

Photo fournie Métropole Films

La vie d'Adèle - Chapitres 1 et 2 d'Abdellatif Kechiche

L'oeuvre de Claude Jutra

Vénéré depuis sa mort en 1986, Claude Jutra fut désacralisé d'un coup 30 ans plus tard, soit le jour où des allégations de pédophilie furent révélées.

Comme l'oeuvre de Polanski, celle de Jutra doit-elle être distincte de l'homme?

Il revient à chaque cinéphile d'en décider, mais force est d'admettre qu'il est maintenant plus difficile de regarder À tout prendreMon oncle Antoine ou Kamouraska avec la même sérénité.

Photo fournie par l'ONF

Mon oncle Antoine de Claude Jutra

Dancer in the Dark, Lars von Trier

Elle ne l'a jamais nommé, mais Björk visait clairement Lars von Trier quand elle a dénoncé, dans la foulée de l'affaire Weinstein, le harcèlement sexuel qu'elle aurait subi pendant le tournage de Dancer in the Dark.

Le trublion du cinéma danois a rejeté les dires de la chanteuse islandaise.

«Ce n'était pas le cas, mais le fait est que nous n'étions pas amis», a déclaré von Trier.

PHOTO ARCHIVES LA PRESSE

Catherine Deneuve et Björk dans Dancer in The Dark.