Un des pionniers des Contes pour tous qui ont fait la joie des petits et grands depuis trois décennies, le scénariste et réalisateur André Melançon vient de nous quitter. Il avait 74 ans.

Il souffrait depuis quelques années de leucémie.

Né le 18 février 1942 à Rouyn-Noranda, André Melançon doit bien sûr sa renommée pour son travail accompli au sein des Contes pour tous, ces longs métrages jeunesse des Productions de la Fête, maison fondée et longtemps dirigée par Rock Demers.

L'aventure commence en 1984 alors qu'il réalise La guerre des tuques d'après un scénario de Roger Cantin et Danyèle Patenaude. La comédie dramatique remporte un immense succès, au Québec comme sur la scène internationale.

«On ne tourne pas un film en se disant que ce sera une oeuvre culte, disait-il en entrevue à La Presse en mars 2015. On veut juste faire le meilleur film possible. Je pense que les enfants ont retenu de ce film le plaisir de faire des choses ensemble, comme construire un château de neige. Au fil des ans, plusieurs personnes m'ont confié que leur enfance ressemble à La guerre des tuques

Deux ans plus tard, en 1986, M. Melançon remet ça en écrivant et réalisant le film Bach et Bottine mettant en vedette une toute jeune comédienne du nom de Mahée Paiement.

Toujours dans les Contes pour tous, Melançon participera au scénario de La grenouille et la baleine, réalisera Fierro: l'été des secrets ainsi que Daniel et les Superdogs. Plus récemment, en 2014, il avait signé le scénario du film La gang des hors-la-loi et devait en faire la réalisation. Mais, la maladie le tenant à l'écart, ce travail avait été confié à Jean Beaudry. L'auteur avait toutefois joué un petit rôle dans le long métrage.

Les enfants: un naturel

Enfant, à Rouyn-Noranda, Melançon fréquente beaucoup les salles de cinéma de la ville. À 14 ans, il voit La Strada de Fellini. C'est le coup de foudre. «Ce film a été mon chemin de Damas, déclare-t-il au moment de recevoir le Prix Albert-Tessier en 2012. J'ai compris que le cinéma ne racontait pas seulement des histoires, mais qu'il y avait une façon de les raconter. J'ai découvert ainsi le langage cinématographique.»

Son affection pour le cinéma jeunesse n'est pas surprenante lorsqu'on sait que dans sa vingtaine, André Melançon fut psychoéducateur. Son premier film, en 1967, s'intitule Le camp de Boscoville, du nom de cette institution vouée aux jeunes délinquants.

Une dizaine d'années plus tard, son film Les vrais perdants fait beaucoup de bruit. Ce documentaire se penche sur le phénomène des parents qui veulent à tout prix voir leur enfant devenir champion dans une discipline sportive ou artistique.

En 1969, M. Melançon devient animateur de tournées de films québécois en région. Dans les années subséquentes, il réalise ses premières oeuvres. En même temps, il devient acteur. C'est ainsi qu'on l'a vu tenir des rôles dans plusieurs films parmi lesquels Taureau de Clément Perron, Réjeanne Padovani de Denys Arcand, Pouvoir intime d'Yves Simoneau ou encore Les matins infidèles de Jean Beaudry et François Bouvier. À la télévision, on l'avait aussi vu dans la deuxième saison de la télésérie Lance et compte.

LNI

Au cinéma, André Melançon comptait aussi des drames, des comédies et des documentaires à sa feuille de route. Parmi plusieurs titres, notons Comme les six doigts de la main, Le lys cassé, Rafales, Nénette, L'âge de passion ou Les trains de la vie.

Il a également travaillé pour la télévision, réalisant des oeuvres telles Cher Olivier, Albertine en cinq temps, Ces enfants d'ailleurs ou encore la série Asbestos.

Et que dire de son passage dans la Ligue nationale d'improvisation (LNI) où, dans les années 1980 et 1990, il avait remporté quatre championnats et trois coupes Charade à titre d'entraîneur.

Intronisé au Temple de la renommée de la LNI le 22 avril 2003, André Melançon détiendrait toujours, selon le site web de la Ligue, le record du nombre d'improvisations dites «coachées», soit 2049 et le plus grand nombre de victoires pour un entraineur, soit 104.

Sa carrière fut jalonnée de nombreux prix. Le Prix du Québec Albert-Tessier remis en 2012 avait pour but de souligner l'ensemble de sa contribution à l'industrie cinématographique du Québec. Cette année-là, le jury lui ayant attribué le prix était formé de Gabriel Arcand (président), Normand Corbeil, Micheline Lanctôt et Geneviève Lavoie.

Compagnon de vie de la comédienne Andrée Lachapelle depuis de nombreuses années, André Melançon n'est jamais resté éloigné de sa passion pour la jeunesse. En 2003, il commence à faire du bénévolat avec le Dr Gilles Julien dans Hochelaga-Maisonneuve. Il en tire un documentaire, Printemps fragiles, qu'il ira présenter au Festival du cinéma international en Abitibi-Témiscamingue.

Au fil des ans, Melançon retourne régulièrement dans son Abitibi natale. En septembre 2013, il séjourne à Val-d'Or où il est invité d'honneur de la quatrième édition du festival de cinéma des gens d'ici. En entrevue au journal L'écho abitibien, il déclare: «Le cinéma jeunesse m'a permis de marier mes deux passions, soit le cinéma et les enfants».

Un autre hommage lui a été rendu le soir du dimanche 15 mars 2015 alors qu'il recevait un prix Jutra pour l'ensemble de sa carrière cinématographique. «Ce métier me rend heureux et je le vis régulièrement comme un privilège. Et là, c'est comme si on donnait une chaleur supplémentaire à ce privilège», disait-il alors à La Presse quelques jours avant de recevoir son prix.

Filmographie d'André Melançon

2008: L'âge de passion (documentaire)

2004: Daniel et les Superdogs

2002: Asbestos (série télé)

2001: Le ciel sur la tête

2000: Albertine en cinq temps

1991: Nénette

1990: Rafales

1989: Fierro... l'été des secrets

1987: Le lys cassé

1986: Bach et Bottine

1984: La guerre des tuques

1980: L'espace d'un été (documentaire)

1978: Les vrais perdants (documentaire)

1978: Comme les six doigts de la main

1974: Les tacots (court métrage)

1974: Le violon de Gaston (court métrage)

1973: Des armes et les hommes

PHOTO ARCHIVES LA PRESSE

La guerre des tuques