De l'insouciant Robert Mitchum au laconique Clint Eastwood en passant par l'icône John Wayne, les cowboys hollywoodiens sont immanquablement des hommes forts, ténébreux et... blancs. Cette uniformité ne colle pas à la réalité historique, ce qu'un remake des Sept mercenaires entend rectifier.

Les héros de westerns - comme les légendaires Jesse James, Billy the Kid ou Wyatt Earp - dépeignent à tort une Amérique blanche, alors qu'en réalité un melting-pot de Chinois, de Noirs, Mexicains, Européens ou Amérindiens a façonné le Far-West.

Le réalisateur américain noir Antoine Fuqua a décidé de filmer sa version des Sept mercenaires, un western de 1960, et choisi l'acteur noir Denzel Washington pour le rôle du cowboy principal.

«Je me suis dit: «Il faut que ce soit un évènement, il faut que ce soit quelque chose qui n'a pas encore été vu, quelque chose qui incarne davantage de diversité. Je me suis dit que Denzel devait jouer le rôle principal», raconte Antoine Fuqua à l'AFP dans son studio de postproduction à Los Angeles.

Son film, attendu dans les salles obscures fin septembre, met aussi en scène le Sud-Coréen Lee Byung-hun et les deux acteurs américains blancs Ethan Hawke et Chris Pratt. Il reprendra la trame du premier film des Sept mercenaires, à savoir l'histoire d'une bande de héros prenant la défense de villageois assaillis par des bandits.

Dans son western de 1960, John Sturges s'était, lui, inspiré du film Les sept samouraïs du Japonais Akira Kurosawa.

Un cowboy sur quatre

Quelques westerns, comme les récents Django Unchained et The Hateful Eight de Quentin Tarantino, ont déjà montré des cowboys noirs, mais l'histoire d'Hollywood recèle aussi des erreurs factuelles.

L'historien Jim Austin, président du National Multicultural Western Heritage Museum à Fort Worth (Texas, sud), cite en exemple le film Lone Ranger, qui raconte les aventures d'un homme blanc masqué et de son acolyte amérindien Tonto, joué par Johnny Depp.

Le héros de Lone Ranger serait en fait inspiré d'un personnage réel, un policier noir nommé Bass Reeves qui affiche un impressionnant palmarès de 3000 arrestations durant sa carrière.

«Hollywood a pris l'histoire de M. Bass et l'a renversée», remarque M. Austin, rappelant que «l'histoire blanche» enseignée dans les écoles américaines ne correspond pas aux archives du Far West.

De nombreux esclaves des 17e et 18e siècles avaient travaillé avec du bétail en Afrique de l'Ouest et cherchaient, grâce à cette expérience, une vie meilleure dans l'Ouest américain.

Au début du 19e siècle, de nombreux cowboys noirs travaillaient dans des ranchs texans et ils étaient encore plus nombreux à débourrer des chevaux ou à faire traverser des troupeaux par-delà les rivières après la guerre de Sécession.

«Nous avons découvert que si vous parlez à certains cowboys (de nos jours), ils vous diront qu'il y avait 80% de cowboys noirs», explique Jim Austin.

Le nombre réel est plus proche de 40% dans tout l'Ouest américain, assure-t-il, tandis que des historiens plus conservateurs parlent d'un cowboy noir sur quatre et seulement dans certaines parties du Texas.

Les Blancs «sauvent la planète»

Selon Jim Austin, Hollywood a longtemps craint que des acteurs noirs dans les rôles principaux n'éloignent les spectateurs blancs, mais les études réalisées de nos jours montrent invariablement que la diversité des castings est bénéfique aux chiffres du box-office.

L'Association des cowboys noirs d'Oakland, qui organise chaque année une parade dans cette ville californienne, cherche à familiariser le public à l'idée que les cowboys n'étaient pas seulement des Blancs.

Les producteurs, scénaristes et réalisateurs, majoritairement blancs à Hollywood, ont tendance à «créer des histoires et des images qui les élèvent en tant que race», assure Andre Alporter, porte-parole de cette association.

Les Blancs «sont les héros, ils ont le beau rôle, pénètrent dans des bâtiments en train d'exploser et sauvent la planète», remarque-t-il.

«C'est comme si les hommes blancs avaient tout fait (...) et ce n'est pas une représentation de l'Amérique réelle», conclut M. Alporter.