Treize ans après Finding Nemo, Pixar tente de renouer avec le succès colossal du film en poussant sous les projecteurs un personnage secondaire adoré du public, le poisson amnésique Dory: un pari risqué vu le nombre de suites tardives qui ont fait flop.

Finding Nemo, l'odyssée sous-marine du poisson hyper-anxieux Marlin pour retrouver son fils Nemo disparu, a gagné un Oscar et près d'un milliard de dollars de recettes en 2003.

Finding Dory, avec les voix d'Ellen DeGeneres, Idris Elba et Diane Keaton, suit cette fois l'épopée de la compagne étourdie et gaffeuse de Marlin, la poissonne bleue Dory, à la recherche de sa propre famille.

À l'heure où Hollywood dope ses bénéfices à coup de blockbusters aux multiples suites, particulièrement chez Disney, maison mère de Pixar, treize ans entre deux films semble une éternité.

À mesure que le temps passe, l'attachement du public à une histoire ou des personnages peut en effet s'émousser.

Le Parrain III, sorti en 1990, seize ans après le précédent opus oscarisé, fut un bide, et Zoolander 2, sorti en février 15 ans après le premier, est passé inaperçu. Sans parler des oubliables Bambi II, Blues Brothers II et autres Retour à Oz.

Récemment, plusieurs sagas ont toutefois réussi leur retour: Creed: l'héritage de Rocky Balboa et Mad Max: Fury Road, sortis dix ans après le précédent opus, ont récolté éloge, prix et succès au box-office.

Poulpe grincheux

Sans parler de Star Wars: le réveil de la Force, record de recettes aux États-Unis, une décennie après le précédent épisode, illustrant la maestria du marketing de Disney.

Jeff Bock, expert en box-office chez Exhibitor Relations, s'attend à ce que Finding Dory qui sort mi-juin, soit l'un des succès de l'été et rapporte un milliard de dollars au box-office.

Lors d'un entretien, le réalisateur de Finding Dory, Andrew Stanton, a assuré n'avoir reçu aucune pression de Disney pour accoucher plus rapidement d'une suite.

«Notre accord quand ils ont racheté Pixar stipulait qu'on ne ferait de suites que si on avait une histoire qui tienne vraiment la route», déclare celui qui était déjà aux manettes pour Nemo.

D'autant que «la seule suite que nous ayons faite sous une demande commerciale, Toy Story 2, a failli mal tourner. Nous avons appris notre leçon», remarque-t-il.

«Et puis chaque film, c'est quatre années, alors est-ce que je veux vraiment passer seize ans de ma vie à faire des films de poissons?», plaisante celui qui a également réalisé le dessin animé oscarisé Wall-E et le film de science-fiction John Carter.

Finding Dory a mobilisé près de 250 personnes, du premier scénario aux 108 000 pages de storyboard, en passant par la conception et l'animation de nouveaux personnages, comme Hank la pieuvre.

Ce vieux poulpe grincheux aux métamorphoses hilarantes a donné du fil à retordre aux animateurs, qui ont passé des semaines à trouver comment faire ramper numériquement ses sept tentacules gluantes.

L'un des plus grands défis a été d'intégrer les progrès des treize dernières années dans l'animation numérique, tout en restant fidèle à l'univers visuel d'origine.

Dans la scène sur la rencontre entre Dory et Marlin, présente dans les deux films, la différence est frappante: dans le premier, l'eau est invisible et sans texture, ce sont les ondulations des algues et des nageoires qui évoquent l'univers sous-marin.

Dans Dory, on perçoit la salinité et le plancton, les effets d'optiques de l'eau, les jeux d'ombre et lumière du soleil sur les algues et récifs, les bulles d'air, les nuages de sable déplacés...

C'est de nouveau la volubile présentatrice vedette Ellen DeGeneres qui prête sa voix à Dory.

Lorsqu'il travaillait sur Nemo, Andrew Stanton avait été inspiré par l'idée que certains poissons avaient une mémoire de cinq secondes, mais n'arrivait pas à donner vie à un personnage amnésique.

«Un jour j'ai vu Ellen à la télévision, qui passait d'un sujet à l'autre cinq fois en une phrase. Après je n'arrêtais plus d'écrire», raconte-t-il.

Il l'a alors appelée pour lui demander de jouer Dory, lui déclarant: «Si vous n'acceptez pas, je suis fichu. Elle a simplement répondu: «Bon, et bien il vaut mieux que je le fasse»».

Pour reprendre le rôle, la conversation a été encore plus succincte. «Ça a été l'échange le plus court» de ma carrière, s'amuse Stanton.