De la fascination pour le vaudou au début du XXe siècle à l'apothéose actuelle, le zombie a vécu de nombreuses transformations au cinéma, avec comme point focal Night of the Living Dead de George Romero, le père de tous les films de zombies.

Le zombie, qui fait la fortune des studios de cinéma, est un cadeau d'Haïti, en quelque sorte. Cette figure du mort-vivant nous vient de la culture vaudou, alors que le zombie représentait celui ou celle qui avait perdu son âme et était sous le contrôle de celui qui l'avait transformé. On peut y voir une puissante métaphore de l'esclavage.

Mais comment le zombie s'est-il frayé un chemin jusqu'à Hollywood? Par contamination ou appropriation culturelle, probablement, puisque les États-Unis ont occupé Haïti de 1915 à 1934. Et par un livre publié en 1929, L'île magique de William Seabrook, qui a suscité un fort engouement pour la culture vaudou et le zombie. Car le zombie sera pendant longtemps une obsession exclusivement américaine.

Ironiquement, le premier zombie du cinéma est blanc: c'est Bela Lugosi dans le White Zombie de Victor Halperin en 1932. La créature apparaît ici et là dans des films modestes, tournés par de petits studios, qui, avec le recul et l'intérêt populaire, du simple fait qu'ils sont les premiers, sont devenus des films cultes chez les amateurs, notamment Vaudou (I Walked with a Zombie) de Jacques Tourneur.

Romero, ce héros

Mais le père du zombie moderne, celui qui inspire encore les créateurs aujourd'hui, est George Romero. S'il n'y a qu'un seul film de zombies à voir pour le néophyte, c'est bien son Night of the Living Dead, tourné en noir et blanc avec un budget famélique et sorti en 1968. C'est là que le concept du bouffeur de chair humaine et que l'idée de l'épidémie sont nés, accompagnés d'une critique sociale, qui font toujours recette.

Étonnamment, il faudra un certain temps après ce film avant que le thème soit récupéré, à part quelques incursions notables. Mais c'est toujours le même Romero qui lancera la vague morbide qui déferlera définitivement dans les cinémas du monde entier, lorsqu'il proposera en 1978 Dawn of the Dead. Cette fois, les survivants qui doivent combattre les morts-vivants sont retranchés dans un centre commercial. Comment ne pas y voir, gros comme le bras, une critique de la société de consommation?

Toujours est-il que ce film fera des petits, particulièrement en Italie, le cinéaste Lucio Fulci en tête. Les années 80, premier âge d'or du genre, nous ont régalés de zombies à toutes les sauces (italiennes), dans des films «of the dead» où l'on se perd entre les titres traduits n'importe comment en anglais ou en français. On aura même droit à des zombies nazis, adolescents, érotiques ou punks!

Les vieux fans de films d'horreur vous le diront, les années 90 ont été moroses pour eux. Le public n'en avait plus que pour les thrillers psychologiques à la Fatal Attraction ou The Silence of the Lambs. Heureusement, un certain Peter Jackson, jeune Néo-Zélandais qui tournera plus tard la trilogie Lord of the Rings, s'est lâché lousse avec une comédie horrifique devenue culte: Braindead. Des morts-vivants et du sang? En voulez-vous, en v'là! Une véritable orgie, comme pour compenser la famine!

L'invasion planétaire

Les années 2000 marquent le retour en force du zombie, et plus particulièrement dans son concept viral. Comme si la créature s'accordait parfaitement à des peurs à dimensions nouvelles et planétaires. Le monde va plus vite, le zombie accélère, il a la rage. Le bal est lancé par 28 Days Later de Danny Boyle, qui ressemble à un retour du refoulé, dans un hommage évident à Romero, qui persiste d'ailleurs à tourner des films de zombies.

Dès lors, le zombie est là pour rester et se taillera même une place de choix dans la renaissance des séries télé avec The Walking Dead ou iZombie. Il n'appartient plus seulement à l'horreur, il fait aussi dans la comédie comme dans l'excellent Shaun of the Dead d'Edgar Wright. Et il devient international, puisque chaque pays semble avoir son film de morts-vivants, même Cuba avec le récent Juan of the Dead, et bientôt le Québec (enfin!) quand on sait que Robin Aubert travaille au film Les affamés. Pour le meilleur et pour le pire aussi: World War Z, qui devait être le film ultime de zombies, n'aura été qu'un bide lamentable et on ne compte plus les suites et remakes sur le thème du mort-vivant, au risque de la surdose. On a même tenté la romance comique avec Warm Bodies!

Et nous voici maintenant avec Pride and Prejudice and Zombies qui tente l'improbable rapprochement entre les fans de Jane Austen et les fans de films d'horreur...

IMAGE FOURNIE PAR LA MAISON D’ÉDITION

En 1929, le livre L’île magique de William Seabrook a suscité un fort engouement pour la culture vaudou et le zombie.

Les cycles du zombie

Premières apparitions (1930-1950)

1932 - White Zombie de Victor Halperin: Film de série B tourné avec les moyens du bord et mettant en vedette le fameux Bela Lugosi. Devenu culte, peu importe ses qualités, puisqu'il signe la naissance du zombie au cinéma.

1936 - Ouanga de George Terwilliger: Quand une prêtresse vaudou se venge d'un propriétaire de plantation blanc en attaquant sa fiancée, avec pas mal de clichés racistes...

1936 - Le mort qui marche de Michael Curtiz: Un croisement de film de gangsters et de film de monstres avec, dans le rôle principal, Boris Karloff, qui deviendra l'incarnation la plus célèbre de Frankenstein.

1943 - Vaudou (I Walked with a Zombie) de Jacques Tourneur: Considéré comme un classique. Une infirmière pense s'occuper d'une femme ayant été envoûtée, mais il s'agit d'une zombie...

Naissance du zombie (1950-1975)

1968 - Night of the Living Dead de George Romero: Tourné en noir et blanc avec un budget dérisoire (un peu plus de 100 000 $), c'est LE film qui a donné véritablement naissance au zombie tel qu'on le perçoit encore aujourd'hui.

1972 - Children Shouldn't Play with Dead Things de Bob Clark

1973 - La révolte des morts-vivants d'Amando de Ossorio

1974 - Le massacre des morts-vivants de Jorge Grau

La déferlante (1975-1990)

1978 - Dawn of the Dead de George Romero: En reprenant le thème des morts-vivants 10 ans après son Night of the Living Dead, Romero lance définitivement la mode du zombie.

1978 - Shock Waves de Ken Wiederhorn

1979 - L'enfer des zombies de Lucio Fulci

1980 - Zombi Holocaust de Franco Martinelli

1980 - La nuit érotique des morts-vivants de Joe D'amato

1985 - Day of the Dead de George Romero

1985 - Re-Animator de Stuart Gordon

1985 - Return of the Living Dead de Dan O'Bannon

1988 -  The Serpent and the Rainbow de Wes Craven

Creux de vague (1990-2000)

1990 - The Night of the Living Dead de Tom Savini

1992 - Evil Dead 3 de Sam Raimi

1992 - Braindead de Peter Jackson: Le futur réalisateur du Seigneur des anneaux s'est fait connaître dans le monde entier par cette irrésistible comédie gore, qui pisse littéralement le sang.

1994 - Dellamorte, Dellamore de Michele Soavi

L'apocalypse (2000 à aujourd'hui)

2002 - 28 Days Later de Danny Boyle: Le Britannique Danny Boyle a ramené le mort-vivant au goût du jour par ce film inclassable, dont on se rappelle encore la magistrale scène de Londres désertée.

2002 - Resident Evil de Paul W.S. Anderson

2004 - Shaun of the Dead d'Edgar Wright

2004 - Dawn of the Dead (remake) de Zack Snyder

2005 - Land of the Dead de George Romero

2007 - I Am Legend de Francis Lawrence

2009 - Zombieland de Ruben Fleisher

2010 - The Walking Dead (série télé)

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