La Cinémathèque québécoise, qui estime avoir un manque à gagner de 600 000$ pour boucler son budget annuel d'exploitation, mène avec Bibliothèque et Archives nationales du Québec (BAnQ) «une étude d'opportunité» pour évaluer comment elles pourraient arrimer certains services, selon ce qu'a appris La Presse.

Ce n'est pas d'hier que l'institution de conservation et de diffusion du cinéma, connue du grand public pour ses projections organisées dans ses locaux du boulevard de Maisonneuve, dans le Quartier latin de Montréal, peine à remplir sa mission tout en jonglant avec un budget contraignant.

«Avec notre déficit, qui revient chaque année, on n'est pas capable de développer nos activités, de vraiment remplir la totalité de notre mission. [...] Par exemple, on a une collection très importante, mais beaucoup de nos films ne sont pas mis à la disposition du public, car on n'a pas le personnel nécessaire», a expliqué la directrice générale, Iolande Cadrin-Rossignol.

À la Cinémathèque, a-t-elle dit, «on vit dans l'austérité à longueur d'année». Et tout le monde y met du sien. La soixantaine d'employés - syndiqués - n'ont d'ailleurs toujours pas renouvelé leur convention collective, qui prenait fin en 2008. Cela équivaut à un gel salarial depuis près de six ans.

Pour résoudre ce problème récurrent, la direction de l'organisme et le ministère de la Culture ont entamé en juin 2013 une série de 50 rencontres. Selon ce qu'a appris La Presse, un comité de travail avait même trouvé une solution à long terme: réclamer une contribution aux producteurs pour qu'ils financent en partie la Cinémathèque dans sa mission de conservation du cinéma québécois.

Or, l'annonce de réduction des crédits d'impôt pour l'industrie du film et de la télévision, en juin dernier, aurait mis un frein au projet. Plusieurs se sont en effet demandé comment on pouvait demander une nouvelle contribution aux producteurs, alors qu'ils sont eux aussi confrontés à de nouveaux défis budgétaires.

C'est ainsi que, de retour à la case départ, le Ministère aurait proposé à la Cinémathèque et à BAnQ d'évaluer l'arrimage de certains de leurs services.

«Nous essayons de voir comment mettre en commun les ressources, car les deux institutions ont des missions semblables. [...] La Cinémathèque fait de la diffusion, ce qui n'est pas le rôle de BAnQ. L'étude d'opportunité évalue entre autres ce qui pourrait être fait au niveau de l'archivage», a expliqué Philip Proulx, attaché de presse de la ministre de la Culture, Hélène David.

Le milieu inquiet

Devant toutes ces questions, le milieu du cinéma, qui connaît bien le rôle assumé par la Cinémathèque, est inquiet. C'est notamment le cas de Marie-Josée Raymond, directrice du projet philanthropique Éléphant, qui restaure et numérise le patrimoine cinématographique québécois.

«La Cinémathèque québécoise est très particulière, en ce sens qu'elle est dépositaire des éléments originaux des films. Non seulement elle inventorie les films, elle garde aussi une copie de projection, le négatif original et le son magnétique original. BAnQ n'est pas équipée pour faire ce travail-là. Elle en a déjà plein les bras», estime-t-elle.