YSL: trois lettres, une marque, un monde et maintenant un biopic tout simplement intitulé Yves Saint Laurent. Réalisé par l'acteur d'origine algérienne Jalil Lespert, Yves Saint Laurent a été présenté, hier, en ouverture de Panorama, la Quinzaine berlinoise qui accueillera aussi sur ses écrans Triptyque de Robert Lepage.

Les biopics, comme on les surnomme, ont souvent raconté la vie dissolue de rockers célèbres ou de héros politiques, mais rarement de designers de mode.

L'enfer de la drogue

À cet égard, celui consacré à Yves Saint Laurent innove sur le plan du décor dramatique et des costumes, qui sont d'authentiques pièces de musée, mais pas sur celui du récit ou du traitement. Car en fin de compte, les excès de Saint Laurent ne sont pas très différents de ceux de Jim Morrison, de Johnny Cash ou de Janis Joplin. Comme eux, il a connu la gloire jeune, a perdu la tête, avant de sombrer dans l'enfer de la drogue comme le veut la tradition.

L'intérêt de ce biopic tient surtout au fait que le portrait de YSL, un génie, certes, mais bipolaire, caractériel et invivable, est moins intéressant que celui de son compagnon, protecteur et mécène, Pierre Bergé. Celui-ci devrait d'ailleurs être canonisé tant il semble en avoir bavé.

Or, si Pierre Bergé n'était pas tombé follement amoureux du jeune génie bipolaire et n'avait pas pris en main sa vie et sa maison, on peut se demander si Saint Laurent aurait connu la carrière qu'il a connue. Bref, le génie, c'est bien beau, mais s'il n'est pas encadré, il peut partir en fumée assez vite, merci.

L'autre particularité de ce film, c'est que les deux rôles principaux sont tenus par des acteurs de la Comédie-Française dont l'un, Pierre Niney, qui interprète Saint Laurent, en est, à 23 ans, le plus jeune sociétaire.

Quant à l'autre, Guillaume Gallienne, qui interprète Bergé, il est surtout la vedette de Les garçons et de Guillaume à table !, le film qui cartonne le plus en ce moment en France et qui a obtenu le plus de nominations aux Césars.

Sorti en France l'automne dernier, Yves Saint Laurent a connu un grand succès avec 1,5 million d'entrées et, surtout, un contrat de distribution aux États-Unis avec nul autre que Harvey Weinstein.

Fierté nationale

Dernier point qui plaide en faveur du film, notre Charlotte Le Bon nationale, dont la carrière française se porte à merveille, y tient le rôle de Victoire, la première muse de Saint Laurent. Et elle y est non seulement d'une beauté sublime, mais d'une grande justesse dans ce qu'elle qualifie elle-même de rôle de prédatrice féminine.

En plus, son accent parisien est impeccable. Ceux qui ne savent pas qu'elle est québécoise vont la trouver formidable et ceux qui savent où elle est née vont trouver qu'elle a non seulement du talent, mais un brin de génie.

Photo AFP

Jalil Lespert, acteur d'origine algérienne et réalisateur d'Yves Saint Laurent, accompagné de l'actrice Charlotte Le Bon et des acteurs Pierre Niney et Guillaume Gallienne, au cours de la présentation du film hier à Berlin.