Le cinéma français est appelé à repenser son mode de financement pour résister au numérique et aux effets de la crise en adoptant notamment des budgets plus raisonnables et en cherchant à attirer des capitaux privés, dans un rapport publié mercredi qui avance cinquante propositions.

Cette «feuille de route» est issue d'une réflexion menée pendant plusieurs mois par un groupe de professionnels. Les propositions, annoncées à l'occasion des deuxièmes Assises du cinéma français, seront soumises aux pouvoirs publics ou feront l'objet de discussions au sein de la profession.

Le rapport, présenté par un ancien responsable du groupe Gaumont, des chaînes Canal+ et France Télévisions, René Bonnell, préconise en particulier davantage de transparence pour maîtriser les coûts des films, en affichant clairement les salaires des acteurs et réalisateurs.

Il propose aussi de «favoriser la baisse des cachets excessifs des vedettes» en incitant au partage du risque commercial par un intéressement calculé, par exemple, sur les entrées en salles et les chiffres d'affaires sur les autres supports de diffusion.

Le rapport appelle également à plus de transparence sur les recettes des films en salles et d'équité dans leur partage entre distributeurs, producteurs et auteurs. Il préconise aussi de recourir plus fréquemment à la pratique des audits des budgets de production et distribution.

Toutes ces mesures permettront d'attirer des capitaux privés, juge-t-il.

Le système français actuel, envié à l'étranger, passe par un ensemble d'aides générées par des taxes sur les billets de cinéma, mais aussi par les obligations de financement des télévisions historiques gratuites ou payantes, les éditeurs vidéo, des taxes sur les distributeurs de programmes, des crédits d'impôts et autres aides régionales.

Grâce à ce système, le cinéma français affiche une belle vitalité en dépit d'un repli de la fréquentation l'an dernier (-5,3%).

Mais le secteur de la production connaît depuis peu des déséquilibres avec seul un tiers des films affichant un résultat positif. Les films à gros budgets se font aussi plus nombreux et les flops plus vertigineux. Cette inflation est aussi subie par la distribution, qui finance largement les films et doit en outre composer avec une explosion des frais de promotion.

Pendant ce temps, les financeurs historiques subissent les effets de la crise ainsi que la transformation majeure du paysage à l'aune du numérique avec l'apparition de nouvelles chaînes, des supports de diffusion multipliés et la présence de géants américains de l'internet spécialistes du cinéma par abonnement.

«Le consommateur est aussi devenu programmateur», a souligné René Bonnell, en citant l'essor de la vidéo à la demande à l'acte (VaD) et de la télévision de rattrapage (TVR), deux secteurs susceptibles à l'avenir de contribuer au financement du cinéma.