Des professionnels français du 7e Art, représentant notamment UGC, Pathé ou Canal+, ont cette semaine à Pékin poussé leurs pions sur l'immense marché chinois du film, en vantant les atouts du système hexagonal capable de contenir le rouleau-compresseur de Hollywood.

Inquiète de l'«occidentalisation» de sa culture, la Chine maintient en place des quotas draconiens de films étrangers sur son territoire, mais subit néanmoins la supériorité des blockbusters américains et peine à exporter ses propres oeuvres.

D'où la conviction des Français, venus rencontrer leurs homologues et des officiels chinois dans une délégation unissant acteurs publics et privés, que Pékin et Paris partagent des «enjeux communs».

«Ils sont préoccupés par la tenue de leur place, dans leur pays, pour leur cinéma, et donc ils cherchent une coopération qui peut nous permettre, à nous, de mieux vendre les films français en Chine et à eux de mieux défendre leur cinéma - contre les Américains essentiellement -», explique Jérôme Seydoux, coprésident de Pathé.

«Cela va dans les deux sens. Si on cherche uniquement à vendre notre camelote, on ne va pas réussir», ajoute-t-il.

Aux yeux des Chinois la France, avec sa politique publique du 7e Art, représente un cas singulier: bien que 200 films américains y sortent par an (un tiers du total), le cinéma français maintient une part de marché élevée de 40%.

«Comment faites-vous avec un marché ouvert pour que le cinéma américain ne fasse que 50% de parts de marché et pas 75%, 80% ou 85% comme dans beaucoup de pays?», ont demandé les Chinois, relate Alain Sussfeld, directeur général d'UGC.

Se gardant de vouloir passer pour des «donneurs de leçons», les Français ont tenté de convaincre leurs interlocuteurs des vertus de la diversité et proposé de favoriser les coproductions franco-chinoises.

«Notre ligne, qui est la réalité de ce qui se passe en France, c'est que la diversité nourrit aussi la part de marché nationale et nourrit globalement le volume des publics», souligne Audrey Azoulay, directrice générale déléguée du Centre national du cinéma (CNC).

La délégation française, qui a été notamment reçue au ministère chinois de la Culture, n'a pas obtenu d'engagements sur la question sensible des quotas.

Mais elle a suggéré qu'une «exception» permette une «exposition» en Chine de films tels que Le gamin à vélo (des frères Dardenne), Amour (de l'Autrichien Michael Haneke) ou Les neiges du Kilimandjaro (de Robert Guédiguian). Même si la distribution ne devait se cantonner qu'à quelques dizaines ou centaines de copies, face aux milliers des superproductions hollywoodiennes...

Les professionnels du cinéma français espèrent profiter d'un coup de pouce politique, convaincus que leur cause a été plaidée en haut lieu en 2013, année qui a vu se succéder à Pékin le président François Hollande, la ministre de la Culture Aurélie Filippetti, le ministre de l'Économie Pierre Moscovici et le Premier ministre Jean-Marc Ayrault.

Cette année, six films français sont sortis en Chine qui, avec 5,3 millions d'entrées, s'est imposée comme le deuxième marché pour le cinéma français après les États-Unis. «Un plan parfait», comédie sortie en 2012 avec Dany Boon et Diane Kruger, a rassemblé à lui seul cette année plus d'un million de spectateurs.

C'est dire les perspectives de cet eldorado, où dix nouveaux écrans s'ouvrent chaque jour: de 4000 en 2008, on est passé en Chine à 13 000 écrans en 2012 et on devrait approcher les 18 000 écrans début 2014.

«Ils ont un objectif de faire un marché intérieur de l'ordre d'un milliard d'entrées» par an, insiste Alain Sussfeld.

«Ils commencent à se poser la question de comment fournir ces salles en films et nous, on leur explique que les fournir en films uniquement américains est une vision à court terme», résume Carole Scotta, productrice et distributrice de la société Haut et Court.