Benigni, Bertolucci, Tornatore, le monde du cinéma et de l'audiovisuel italien a lancé mardi un appel au chef du gouvernement Enrico Letta pour qu'il défende l'exception culturelle européenne en vue du lancement à la mi-juin de négociations entre Europe et États-Unis pour un accord de libre-échange.

La lettre a été signée notamment par quatre détenteurs d'Oscars, Roberto Benigni (pour La vie est belle), Bernardo Bertolucci (Le dernier empereur), Giuseppe Tornatore (Cinema Paradiso) et Gabriele Salvatore (Mediterraneo).

Mais aussi par la Rai (radio-télévision publique), le groupe privé Mediaset (qui appartient à Silvio Berlusconi), de nombreuses associations, des syndicats, les firmes du secteur, la fédération patronale Confindustria, etc.

Les signataires demandent au gouvernement de M. Letta de «prendre une position forte» et de s'opposer à ce que «les activités culturelles et audiovisuelles» quelles qu'elles soient, y compris numériques, fassent partie des négociations entre Union européenne et États-Unis en vue d'un traité de libre-échange.

Dans leur lettre, ils rappellent que le 14 juin les 27 États membres de l'UE devront «se prononcer sur la version définitive du mandat de négociation» confié à la Commission européenne.

Les signataires estiment que M. Letta a dès son investiture le 28 avril montré vouloir «changer de cap par rapport au passé, en considérant l'industrie culturelle comme une vraie ressource et même une grande opportunité de développement» pour l'Italie.

Pour le monde de l'audiovisuel et du cinéma italien, la principale «menace» réside dans le fait que «les opérateurs de numérique américains n'ont ni sièges, ni salariés, ni chiffre d'affaires, ni fournisseurs, ni engagements et contraintes en Europe». «Ils n'investissent pas dans les réseaux ni sur les territoires, ils ne créent pas de valeur, ni de valeur ajoutée, ni de revenus fiscaux», ont ajouté les pétitionnaires.

«La libéralisation du marché des services audiovisuels réduirait radicalement la valeur ajoutée générée par les filières de distribution actuelles dans toute l'Europe, entraînant des pertes pour l'industrie locale à cause de la réduction des échanges européens, une chute de la demande de produits qui ne seraient pas mainstream (grand public) et un accès difficile au marché pour les produits nationaux», selon les signataires du message.

«Il y a 20 ans, l'expression exception culturelle avait permis la naissance d'une industrie de production culturelle européenne, aujourd'hui il faut étendre cette définition aux technologies nouvelles et à notre époque», ont encore plaidé ces signataires.

Ceux-ci ont rappelé qu'une pétition internationale (https://www.lapetition.be/en-ligne/The-cultural-exception-is-non-negotiable-12826.html qui a déjà recueilli plus de 5000 signatures dont celles des réalisateurs David Lynch, Michael Haneke, Costa Gavras et Agnès Jaoui, Pedro Almodovar, Mike Leigh, Ken Loach, Jean-Pierre et Luc Dardenne et Aki Kaurismaki, serait déposée officiellement au Parlement européen le 14 juin.