La nuit est tombée sur Bruxelles où le froid et l'humidité sont mordants. Encadrée par des immeubles de quelques étages serrés les uns sur les autres, la place du Grand Sablon vit au rythme de la frénésie de fin de journée.

Trams et voitures vont et viennent dans tous les sens entre ces vieux immeubles construits entre les XVIe et XIXe siècles. Quelques touristes flânent devant les vitrines des chocolateries. Les travailleurs s'empressent de rentrer à la maison. Quelques-uns s'arrêtent au bar. Un homme portant un curieux chapeau triangulaire déambule sur la place, bière brune à la main.

Un taxi s'approche et s'arrête. Catherine et Samir en sortent. Ils traversent la place, bras dessus, bras dessous, souriants et heureux.

Catherine (Guylaine Tremblay) et Samir (Reda Chebchoubi) sont deux des principaux personnages de Morrocan Gigolo's, long métrage du réalisateur belge Ismaël Saïdi. Les Québécois François Arnaud et Eddy King font également partie de la distribution.

Relation d'échange

Dans cette histoire, trois jeunes Bruxellois, Samir, Dédé et Nicolas, décident d'ouvrir une sandwicherie. Incapables de trouver les fonds de démarrage, ils deviennent gigolos, décision qui les conduira à une série d'aventures. Pour Samir, sa rencontre avec Catherine le mènera bien en marge du but original recherché.

« Catherine est une Québécoise qui travaille à l'OTAN, dit Guylaine Tremblay en entrevue. Elle a une belle carrière, mais aucune vie intime. Une de ses amies lui commande une escorte. Mais lorsque Samir arrive, ce n'est pas d'avoir une relation sexuelle qui l'intéresse. C'est une relation d'échange et d'écoute. Il se développe autre chose entre les deux. Samir se livre à Catherine et elle fait de même. »

Mme Tremblay avait 11 jours de tournage à Bruxelles et à Liège. Pour elle, il s'agissait d'un premier film tourné en Europe. Mais avant d'accepter, elle tenait à rencontrer le réalisateur pour s'assurer qu'ils partageaient la même vision. C'est le cas.

« Ismaël a la même préoccupation que moi de communiquer avec les gens, dit-elle. Ma façon de communiquer avec les gens [le spectateur] est à travers l'histoire que l'on raconte. Il faut que ce soit limpide. Ismaël a ce souci d'être clair, de parler, de toucher aux gens. Ce qui ne veut pas dire que c'est sans recherche ou approfondissement. »

Rencontre bouleversante

Dans la scène décrite ci-haut, Samir fait découvrir à Catherine un des coins de la ville qu'il affectionne. « Pour Samir, la rencontre avec Catherine est bouleversante, dit Ismaël Saïdi entre deux prises. Catherine a un regard vierge sur lui. Elle le considère comme quelqu'un de normal. Pour une fois, on l'écoute. Il tombe amoureux d'elle. »

En dépit de ce côté tendre, le film est une comédie que M. Saïdi a coécrite avec François Avard. « François a atténué mon côté Disney, dit le réalisateur. Il a apporté une touche d'humour piquante au texte. »

Le producteur québécois Daniel Morin, de Boréal Films, est charmé par le scénario qui ne s'arrête pas au premier degré. « C'est très drôle tout en ayant un côté dramatique et humaniste qui me plaît », dit-il.

Lundi soir, l'équipe s'est installée place Grand Sablon sans autre formalité. Sur les dalles en pierre, on a installé l'attirail cinématographique sans que les passants ne s'en formalisent. La circulation n'a pas été arrêtée. On a simplement crié « action » entre deux flopées de véhicules.

« Techniquement, c'est plus complexe, concède Ismaël Saïdi mais ailleurs, on laisse vivre la ville telle qu'elle est. Ça donne plus de réalité aux images. »

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Les frais de ce reportage ont été payés par Filmoption International.