Le gouvernement Harper compte prendre les grands moyens pour faire perdre à Montréal le titre peu enviable de capitale internationale du piratage de films par caméra numérique.

Le premier ministre Stephen Harper a profité hier du passage à Ottawa du gouverneur de la Californie, Arnold Schwarzenegger, pour expliquer de vive voix à l'ancienne star de Hollywood les grandes lignes des mesures que son gouvernement envisage pour lutter contre le piratage de films.

Cette question constitue l'un des principaux problèmes entre l'État de la Californie et le gouvernement canadien. Entre 40% et 50% des films reproduits illégalement à l'aide de caméras numériques dans les salles de cinéma du monde proviendraient de Montréal, selon l'Association canadienne des distributeurs de films. Ces statistiques font de la métropole québécoise l'une des principales pépinières de films piratés de la planète.

Le ministre de la Justice, Rob Nicholson, déposera donc sous peu un projet de loi afin d'amender le Code criminel pour interdire l'utilisation d'une caméra numérique dans une salle de cinéma, a appris La Presse hier. Le ministre pourrait déposer ce projet de loi demain ou au début de la semaine prochaine. Il pilotera cet épineux dossier avec la ministre du Patrimoine, Bev Oda.

Des mesures semblables existent depuis quelques années déjà aux États-Unis. En décembre 2006, un Américain de 36 ans, Jonny Ray Gasca, a été condamné à sept ans de prison ferme par un juge de Los Angeles, pour avoir notamment piraté le film The Core dans une salle de cinéma au moyen d'un caméscope en 2002.

«Nous sommes conscients qu'en dépit des lois actuelles sur les droits d'auteur, le piratage est une question importante pour l'industrie du film. C'est pourquoi nous avons l'intention d'amender le Code criminel pour lutter contre ce fléau. Les amendements que nous avons en tête permettront aux policiers d'arrêter et de porter des accusations contre ceux qui enregistrent des films à l'aide d'une caméra numérique», a précisé hier Dimitri Soudas, porte-parole du premier ministre.

Aucune loi n'empêche cette pratique présentement. Mais un individu qui se livre à la distribution de films piratés risque une peine de prison maximale de cinq ans et une amende salée de 1 million de dollars en vertu de la Loi sur les droits d'auteur.

Le piratage de films coûte au moins 6 milliards US en perte de revenus chaque année, selon l'industrie américaine du film. Insatisfaits des lois existantes au Canada, les studios Warner Bros. ont récemment décidé de supprimer toutes les projections publiques de leurs films avant leur date de sortie. Il y a quelques semaines, deux sénateurs américains ont aussi écrit une lettre au premier ministre Stephen Harper l'invitant à adopter des mesures plus sévères pour combattre le piratage de films dans les salles de cinéma.

M. Schwarzenegger effectue une visite de trois jours au Canada depuis hier. Le célèbre acteur et le premier ministre Harper n'ont pas rencontré La Presse, sauf pour échanger quelques mots devant les caméras de télévision quelques minutes avant leur rencontre.

Durant leur bref échange, ils ont dit vouloir aborder la délicate question du piratage de films, la lutte contre les changements climatiques, la recherche sur les cellules souches et les échanges commerciaux.

M. Harper a profité de l'occasion pour remettre au gouverneur un chandail des Sénateurs d'Ottawa, qui affrontent les Ducks d'Anaheim en finale de la Coupe Stanley. «Vous allez devoir vous habituer à porter ce chandail durant l'été», a lancé M. Harper, sourire en coin. M. Schwarzenegger a rendu la politesse au premier ministre en lui remettant un chandail de l'équipe californienne.