Le mythique réalisateur italien de cinéma Michelangelo Antonioni a été porté en terre jeudi dans sa ville natale de Ferrare à l'issue d'une cérémonie religieuse sobre dans la basilique Saint Georges, où il avait été baptisé il y a 94 ans.

Dernier géant de sa génération, le maestro, décédé lundi à Rome, avait apporté succès et prestige au cinéma italien des années 60. Plus de 500 personnes, personnalités, famille, amis ou simples habitants de Ferrare, se pressaient dans la nef de l'antique église de cette cité historique du nord de l'Italie.

«Maintenant il est au-delà des nuages, d'où il peut enfin nous parler», a déclaré ému le cinéaste allemand Win Wenders son ami et coauteur de l'un de ses derniers films Par-delà les nuages, réalisé en 1995 alors que le réalisateur était déjà infirme et privé depuis dix ans de la parole par un accident vasculaire cérébral.

Mais plus que l'industrie cinématographique ou le monde du cinéma ce sont ses amis qui étaient venus, notamment le poète et scénariste italien Tonino Guerra.

«Son corps exposé ici me transmet une certaine sérénité. Michelangelo a fini comme il le souhaitait», a déclaré Guerra qui a rappelé à l'assistance combien était forte la personnalité du cinéaste, maître de l'introspection dont la vision moderniste révolutionna le cinéma.

Au premier rang, face au cercueil de bois clair orné d'une fine croix dorée, entouré de quelques couronnes de fleurs, se trouvaient son épouse Enrica Fico, sa compagne depuis 35 ans, et sa nièce Elisabetta. C'est à elle que le cinéaste avait demandé l'an dernier à être enterré au cimetière de Ferrare à côté de ses parents.

Personne ne pleure, personne ne s'est laissé aller à l'émotion durant la cérémonie, empreinte de respect et d'admiration.

La messe a été célébrée par le père Massimo Manservisi, un prêtre passionné de cinéma et metteur en scène à ses heures, qui a fait durant son homélie l'éloge de l'approche toute de curiosité et d'ouverture d'Antonioni.

«Comme Nicodème (chef des pharisiens) Michelangelo était attentif aux signes, il disséquait l'être humain, ses yeux étaient ceux d'un peintre flamand», a dit le religieux.

Le maire-adjoint de Ferrare, Rita Tagliati, qui avait décrété une journée de deuil, a annoncé que le musée d'Antonioni, ouvert en 1995, sera complètement rénové.

Après avoir milité dans les rangs du Parti communiste italien (PCI), l'intellectuel du cinéma et le magicien de la lumière comme il était appelé, avait souhaité avoir des funérailles catholiques traditionnelles.

«Un jour on a demandé à Antonioni au cours d'une entrevue s'il croyait en Dieu. «Oui, parfois ... de nuit», avait-il répondu», a raconté le père Manservisi qui a salué la capacité de l'artiste à surmonter l'infirmité qui le maintenait paralysé depuis 22 ans.

Les participants, parmi lesquels de nombreuses personnes âgées, ont ensuite défilé devant le cercueil qui a quitté la basilique sous les applaudissements avant d'être enterré dans l'intimité du cercle de famille qui l'avait accompagné dans ses dernières années.

«Nous sommes venus souvent avec Michelangelo à Ferrare attiré par la ville et le fleuve Pô car c'était un voyage vers la lumière, vers cette lumière de toujours qu'il cherchait dans sa ville et qui lui donnait le repos», a déclaré la veuve de l'auteur de Blow-Up et de l'Avventura.