La Société générale de financement a fait l'automne dernier ses débuts au cinéma et elle a aimé ça, assez pour augmenter considérablement sa mise. La SGF investira 140 millions US dans 16 films et séries télévisées qui seront tournés par le producteur canado-américain Lionsgate.

C'est le deuxième investissement de la SGF dans l'industrie américaine du cinéma, après les 18 millions US injectés en octobre dernier dans la production d'une série de 15 films par le producteur Joel Silver et son entreprise Dark Castle.

Cette fois, la mise est beaucoup plus grosse, et la SGF espère un rendement plantureux. «Le taux de rendement visé est de 10 %, selon les analyses que nous avons fait faire», a précisé hier Yves Bourque, vice-président de la SGF.

Les 16 productions qui seront tournées au Québec au cours des quatre prochaines années devraient aussi créer 6700 emplois directs et indirects par année et générer 270 millions en salaires, selon le ministre québécois du Développement économique. «Cette entente aura des effets bénéfiques sur l'industrie cinématographique québécoise», s'est félicité hier Raymond Bachand.

Tout le monde n'est pas de cet avis, dont le producteur Roger Frappier, qui estime qu'il y a de meilleures façons d'investir les fonds publics. «Je ne crois pas que ce soit un bon investissement», a-t-il commenté hier, en rappelant que la Caisse de dépôt a investi des centaines de millions de dollars à Hollywood dans l'espoir de susciter des retombées au Québec, sans aucun succès. «Elle a perdu 250 millions là-dedans. On n'apprend pas de nos erreurs.»

De plus en plus de fonds d'investissement sont attirés par l'industrie du cinéma. Le Fonds de solidarité FTQ est aussi en discussion avec le producteur américain Ed Pressman (Wall Street, American Psycho) qui voudrait investir 450 millions US dans une dizaine de films.

Les règles de fonctionnement particulières de l'industrie du cinéma, les nombreux intervenants et les délais très longs avant de toucher un profit commencent toutefois à refroidir plusieurs investisseurs institutionnels aux États-Unis.

À la SGF, on se dit prêt à patienter. «Il faudra attendre une couple d'années (avant de voir les rendements apparaître)», admet Yves Bourque. Toutefois, ajoute-t-il, l'entente avec Lionsgate prévoit le tournage de séries télévisées, dont le retour sur l'investissement est plus rapide que pour les films.

Les retombées économiques au chapitre des emplois créés pendant les tournages sont immédiates, souligne le vice-président de la SGF. Ainsi, Lionsgate vient de tourner au Québec une partie de la série télévisée Dead Zone, inspirée d'un roman de Stephen King. «Entre 80 et 100 personnes y ont travaillé», dit Yves Bourque.

La société d'État est très satisfaite de sa première incursion dans le secteur du cinéma, avec Joel Silver et Dark Castle. Le premier des six films qui doivent être tournés au Québec a été bouclé. Il s'agit de Whiteout, mettant en vedette l'actrice britannique Kate Beckinsale, dont la sortie est prévue au printemps prochain.

En plus des emplois créés pendant les tournages, la SGF s'attend à toucher un rendement de 15 % avec cet investissement dans l'entreprise de Joel Silver, qui a des succès comme The Matrix et Die Hard à son actif.

Le profit que touchera la SGF dépend du succès du film au box-office, mais pas uniquement de ça, selon Yves Bourque. «Le succès du film compte pour 25 %, et le reste vient de la vente de DVD et de la télévision payante.»

Lionsgate, une entreprise considérée comme un mini major et dont les actions sont inscrites à la Bourse de New York, investira 400 millions US dans ces 16 longs métrages et séries télévisées. La participation de la SGF dans chaque production variera selon le nombre de jours de tournage et les retombées économiques attendues au Québec, et atteindra un maximum de 35 % du coût de la production.

Le tournage du premier de ces 16 films commencera à Montréal en octobre prochain. Il s'agira de Punisher 2, avec Ray Stevenson, qui incarnait Titus dans la série Rome diffusée par HBO.