«La première fois que j'ai vu Bernard, la première chose que je lui ai dite, c'est "j'aime les silences dans tes films"», se souvient Guy Jodoin. Quand nous rencontrons le comédien, dans les studios de TVA, au mois de juillet, il est alors en pleine session d'enregistrement de son émission de télévision, Sucré Salé : un bourdonnement bien loin des silences de Contre toute espérance.

La dernière fois que l'on a vu Guy Jodoin au grand écran, c'était dans À vos marques party!, dans un univers aussi éloigné de celui de Bernard Émond que la Terre l'est de la Lune. Guy Jodoin se réjouit de cette incursion dans le film dramatique. «Cela fait 18 ans que je travaille. Plus j'avance, plus je mets de cordes à mon arc, et plus je peux accepter des projets comme celui-là», dit-il.

C'est dans une audition pour le rôle du mari violent de La neuvaine que Bernard Émond est frappé par le jeu de Guy Jodoin. Il ne le retient pas et le rappelle plus tard pour la même raison : son visage, simple, qui suscite la sympathie, comme l'est le visage de Gilles, dans Contre toute espérance.

Gilles mène une vie tranquille avec Réjeanne (Guylaine Tremblay). Un accident va bouleverser son existence et le laisser aphasique, presque privé de parole et de mouvements. Pour habiter justement le handicap, Bernard Émond emmène le comédien à la rencontre d'aphasiques. «Il ne fallait pas que je parodie», dit Guy Jodoin.

«Bernard sait exactement ce qu'il veut. Il me montrait des photos et des vidéos, et ce qu'il veut, c'est aller chercher des gestes dans le quotidien, explique, volubile, Guy Jodoin. Je suis comme une éponge. Je prenais ce que je voyais. Et Bernard me dirigeait comme ça. C'était vraiment comme avoir un catalogue Sears.»

Contre toute espérance a valu à Guy Jodoin sa première invitation au Festival international de Locarno. L'expérience a apparemment ravi le comédien. «Chez Bernard Émond, c'est là où l'on peut toucher presque à l'âme des gens», estime-t-il.