Plusieurs cinéastes présents au Festival de Toronto ont choisi d'aborder l'«invasion» de l'Irak menée par les États-Unis dans une série de films critiques visant à donner un visage à la violence quotidienne sur les rives du Tigre et de l'Euphrate.

Quatre oeuvres présentées dans la métropole canadienne, hôte cette semaine de l'un des plus importants festivals du septième art, dépeignent l'actuel bourbier irakien, dont Battle for Haditha, du britannique Nick Broomfield qui revient sur l'un des épisodes les plus sombres liés à la présence américaine en Irak.

Cette fiction réaliste reconstitue de façon très crue la tuerie de 24 civils irakiens par des Marines américains le 19 novembre 2005 dans la ville de Haditha, ancienne capitale irakienne des lunes de miel devenue aujourd'hui terre de morts, selon l'expression d'un personnage du film.

Le réalisateur accentue les contrastes pour marquer le fossé entre les jeunes Marines paumés, alignant les jurons en roulant à fond la caisse dans le désert en écoutant du heavy metal et les Irakiens à la recherche d'une solution à leurs maux.

Peu après le drame, un communiqué de presse de l'armée américaine avait annoncé la mort de 15 civils dans l'explosion d'une mine le long de la route et de huit insurgés, rappelle le film.

La première enquête de l'armée n'a été ouverte qu'en janvier 2006, quand un journaliste du magazine Time est venu poser des questions après avoir reçu une vidéo tournée par des Irakiens montrant que les victimes avaient été tuées par balles et comptaient des femmes et des enfants.

«Ce film se veut une déclaration sur la situation intenable créée par la politique folle de George Bush qui affecte des pauvres gens, et là j'inclus à la fois les Irakiens et les Marines», a expliqué Nick Broomfield à l'AFP.

Ce dernier a confié les principaux rôles à de jeunes ex-Marines ayant servi en Irak afin de rendre plus réaliste, dit-il, le quotidien des soldats américains. «J'ai adapté mon expérience acquise là-bas», souligne Elliot Ruiz, ex-Marine aujourd'hui en faveur du retrait immédiat des troupes américaines.

Le cinéma américain se réveille sur l'épineuse question de l'Irak après le tollé international suscité par l'attaque des États-Unis en Irak, constate Noah Cowan, co-directeur du Festival des films de Toronto.

Documentaire original mais maladroit, Heavy Metal in Bagdad, également présenté en première à Toronto, retrace l'histoire du seul groupe de heavy metal irakien, Acrassicauda - contraction latine pour scorpion noir - de sa formation sous le régime de Saddam Hussein à sa désintégration.

Les jeunes réalisateurs Suroosh Alvi et Eddy Moretti y décrivent la vie de jeunes Bagdadis fans de Metallica qui peinent à organiser un concert et à répéter en raison de l'insécurité pour finalement s'exiler en Syrie où, sans le sou, ils sont contraints à vendre leurs instruments.

Dans In the Valley of Elah, mettant en vedette Tommy Lee Jones, Charlize Theron et Susan Surandon, le réalisateur canadien Paul Haggis (Crash) retrace pour sa part la quête d'un père américain pour retrouver son fils à son retour de la ligne de front en Irak.

Enfin, le film Body of a War des Américains Ellen Spiro et Phil Donahue se focalise quant à lui sur l'histoire d'un ex-soldat de 26 ans qui suit une formation d'un an pour devenir un activiste de la paix.