L’Âge des ténèbres, le nouveau long-métrage de Denys Arcand, n'a pas plu du tout à la critique française et surtout pas à l'influent magazine culturel Les Inrockuptibles, qui l'a qualifié de «film de vieux con».

Précédé par une importante campagne d'affichage, appuyé par la puissante machine Studio Canal/Canal plus, L’Âge des ténèbres est sorti mercredi dans 260 salles à travers la France. Lors de la déterminante séance de 14h00, le film a connu un démarrage qualifié de moyen.

 Projeté sur 18 écrans parisiens, il a attiré 434 spectateurs, soit une moyenne de 24 personnes par copie. C'est le film 99 francs, adapté du best-seller de Frédéric Beigbeder, qui a connu le meilleur démarrage de la journée. II a fait 1755 entrées dans 24 salles parisiennes, pour une moyenne de 75 spectateurs par projection.

 Autre comparaison: à la même heure, lors de leur sortie en 2003, Les Invasions barbares avaient été vues par deux fois plus d'amateurs de cinéma: 1365 répartis dans 27 salles (soit 51 spectateurs par copie).

 Si le démarrage peut sembler un peu mou, la critique, en revanche, a eu la dent dure. À quelques exceptions près, notamment Le Figaro (franchement enthousiaste) et le Journal du dimanche, l'ensemble de la presse n'a pas aimé L’Âge des ténèbres.

 «Plutôt mal ficelé», aux yeux du journal Le Monde, le nouvel Arcand est un «ramassis de clichés émoussés» pour les Inrocks, un «désastre» pour le quotidien Les Échos et une «grosse déception» pour le gratuit Métro. Le magazine culturel Télérama l'a trouvé «démonstratif» et «rageusement pataud», tandis que le quotidien La Croix a jugé désolant son «humour poussif». Le magazine Marianne, de son côté, a assisté à ces «variations barbantes» avec une «torpeur navrée».

 «À quoi reconnaît-on un film de vieux con? ont demandé Les Inrockuptibles. C'est un film dans lequel le réalisateur clame aveuglément sa haine de l'époque parce qu'il souffre au fond de n'être plus dans le coup.»

 La virulence de certaines critiques n'étonne qu'à moitié. La semaine dernière, Le Nouvel observateur, s'aventurant sur le terrain de la morale,  avait en effet donné le ton avec une attaque particulièrement violente. L'hebdo avait estimé que L’Âge des ténèbres, «laborieux» sur la forme et «discutable» sur le fond, était le «film de trop d'un auteur claquemuré dans une rancoeur stérile».

 Le quotidien Le Parisien, qui avait porté aux nues Les Invasions barbares, ainsi que les magazines de cinéma Studio et Première n'ont accordé à L’Âge des ténèbres qu'une seule étoile. Le Monde a expédié le film en quelques lignes. Libération, qui avait pour sa part détesté les Invasions (tout comme les Inrockuptibles d'ailleurs), ne s'est même pas fendu d'une critique qu'on aurait pu imaginer assassine. Il n'a publié qu'un résumé du film, ce qui revient peut-être au même.

 Personne ou presque n'a aimé le passage-clé du film, celui où Jean-Marc Leblanc (Marc Labrèche) se trouve mêlé à un jeu de rôle médiéval, une scène «ratée» pour La Croix et «ridicule» aux yeux de Métro.

 Tout le monde s'est demandé en revanche où était passé le Denys Arcand «mordant et sensible des Invasions barbares» (Métro), ce «brillant cinéaste, esprit subtil et cultivé» (La Croix).

 Au final, Marc Labrèche est le seul à s'en sortir avec les honneurs, sa performance ayant été saluée par de nombreux critiques.

 «On ne sauvera de ce désastre que Marc Labrèche (...) qui réussit à garder à son personnage une distance sympathique à la Buster Keaton. Il a bien du mérite!», a conclu La Croix.