Mauvais débuts pour L'âge des ténèbres en France. À de notables mais rares exceptions près, la critique se montre très sévère. Et les chiffres de fréquentation pour la fatidique première séance du mercredi sont plus que décevants: avec 434 entrées pour 18 salles parisiennes, soit 24 spectateurs par copie, le film d'Arcand peut encore rebondir, mais il se situe à peine au-dessus de la ligne de flottaison.

En 2006, C.R.A.Z.Y. avait également connu un démarrage difficile, avant d'opérer un redressement presque miraculeux, qui devait le mener à 600 000 entrées en France. Mais la moyenne de fréquentation de la première séance était de 33 spectateurs, ce qui était meilleur. Et, l'année précédente, les tous premiers résultats de La grande séduction annonçaient à coup sûr sa brillante carrière: plus de 1110 spectateurs sur 19 salles, c'est-à-dire 61 spectateurs par salle. Il faudrait donc d'ici à la fin de semaine un étonnant sursaut pour inverser la tendance, pour éviter que le film d'Arcand perde une bonne partie de ses 260 salles de départ et parte dans une spirale descendante.

Contrairement à un autre film sorti hier, 99 francs, le film tiré du best-seller de Frédéric Beigbeider, avec Jean Dujardin en vedette (75 spectateurs par salle), L'âge des ténèbres est un film d'auteur sans vedette connue, qui repose sur la réputation de Denys Arcand, mais aussi sur la critique et le bouche à oreille.

Mauvaises critiques

Ce que sera la rumeur publique, on ne sait pas. Mais en tout cas les médias sont en grande majorité hostiles. Le Figaro fait bande à part et consacre une demi-page au film, lui trouve «de la verve» et une «trivialité dérangeante», loue sa technique de «fondu enchaîné inventif». Le Canard enchaîné fait un résumé assez neutre de cette histoire, «plus disparate que féroce», mais place le film en vedette dans sa sélection hebdomadaire. Télé 7 jours, hebdo à grand tirage, est également favorable à cette «comédie dépressive». Le Parisien - autre grand journal populaire - reste dans une neutralité bienveillante.

Pour le reste, l'ensemble des médias balance entre la petite note de passage et le zéro pointé. Sur une notation de 0 à 3, les huit hebdos répertoriés par Le Nouvel Observateur d'aujourd'hui donnent quatre fois zéro, trois fois 1 (dont L'Express et Le Point), et, une seule fois, 2 (Le Figaro Magazine). L'hebdo culturel Télérama estime que «Denys Arcand surcharge la barque du pessimisme démonstratif», même si «on se console en découvrant la talentueux Marc Labrèche», souvent remarqué dans la presse, qui lui trouve «un air à la Buster Keaton».

Assez radical comme d'habitude, Les Inrockuptibles tire une seule salve: «Une comédie qui séduira les vieux cons et les amateurs de confiture. Les autres s'abstenir.»

Libération se contente de mentionner le film en deux lignes, et l'article du Monde est extrêmement bref et mitigé. Le quotidien économique Les Échos titre sur «Le déclin d'Arcand», et Le Progrès de Lyon, «Les invasions ringardes».

L'âge des ténèbres, après une première journée d'exploitation, n'est pas encore au fond du ravin. Mais s'il remonte la côte, ce sera presque un miracle.