Après avoir raconté l'accession au pouvoir d'Élisabeth, le cinéaste Shekhar Kapur s'attarde aujourd'hui au temps où la souveraine a exercé son pouvoir de façon absolue. Neuf ans après le premier film, Cate Blanchett reprend le rôle qui l'a révélée au monde.

Cate Blanchett n'en fait pas du tout un secret. L'idée d'enfiler de nouveau les costumes de la reine Élisabeth 1re, l'illustre souveraine qui a veillé aux destinées de l'Angleterre pendant une bonne partie du XVIe siècle, ne lui souriait guère. «La perspective de refaire les mêmes choses m'ennuie plutôt, révélait l'actrice récemment au cours d'une rencontre de presse tenue à Los Angeles. J'avais d'autant plus d'appréhensions qu'Elizabeth est le film qui m'a ouvert les portes du cinéma international. Enchaîner tout de suite un deuxième épisode m'aurait paru comme faire du piétinement. Ou comme un retour en arrière.»

Le réalisateur Shekhar Kapur, qui aurait bien voulu remettre le couvert le plus tôt possible après la sortie d'Elizabeth il y a neuf ans, n'a pas lâché prise. Geoffrey Rush, compatriote de Cate Blanchett (ils ont joué ensemble au théâtre en Australie) et interprète de Sir Francis Walsingham (le mentor de la souveraine), s'est lui aussi mis de la partie pour tenter de convaincre l'actrice. «J'ai fait valoir à Cate que de la même manière qu'il existe de grands rôles de répertoire au théâtre, il en existe aussi au cinéma, explique l'acteur, lauréat d'un Oscar grâce à sa performance dans Shine. Ces grands rôles sont d'ailleurs si peu nombreux qu'il serait vraiment dommage de passer outre.»

La persévérance a porté fruit. Dans l'esprit de l'actrice, il s'est maintenant écoulé assez de temps depuis la sortie du premier film pour permettre une approche du rôle différente.

«Avec un personnage aussi riche, les possibilités son infinies, fait remarquer Blanchett. Élisabeth 1re est une énigme totale. C'est probablement la raison pour laquelle elle est l'objet d'autant d'attention. La période où elle a régné est d'ailleurs fascinante d'un point de vue culturel, car elle a pratiquement vu à la naissance des arts en Angleterre. Je suis aussi bien consciente du fait que de grandes et merveilleuses actrices ont déjà interprété Élisabeth au théâtre, au cinéma, et à la télévision. L'héritage est colossal.»

L'actrice dit en outre être très intéressée par la grande histoire. Shekhar Kapur, lui, pas du tout. «C'est probablement la raison pour laquelle nous formons une bonne équipe!» dit la vedette.

Comme le premier épisode, Elizabeth - The Golden Age ne passe d'ailleurs pas l'épreuve des faits historiques. «Parce qu'il n'était pas du tout notre intention d'être rigoureux à ce chapitre, affirme le cinéaste. De toute façon, tous les films à caractère historique relèvent de la fiction car ils sont le résultat de différentes interprétations. Il importe plus à mes yeux de tenter d'établir des liens avec des préoccupations pertinentes à notre époque plutôt que de chercher l'exactitude sur le plan factuel.» 

Des envies de liberté

L'intrigue de ce deuxième volet est ainsi centrée sur les tourments intérieurs d'une femme qui, en raison des pouvoirs dont elle dispose, ne peut se laisser guider par ses sentiments. Kapur plonge en outre la souveraine dans une histoire à caractère romantique alors qu'en cette fin de XVIe siècle, l'Angleterre traverse l'une des plus graves crises de son histoire.

Le récit des aventures de l'explorateur Walter Raleigh (Clive Owen), qui revient du Nouveau monde, fait en effet naître dans l'esprit de la reine des fantasmes d'espace et de liberté qu'elle ne pourra jamais se permettre de réaliser. Des pulsions amoureuses surgissent de surcroît chez cette femme de pouvoir au moment même où l'Angleterre est menacée de toutes parts. Le Roi Philippe II d'Espagne lance notamment une offensive pour renverser le régime et permettre à une reine catholique d'accéder au trône, une certaine Marie, reine d'Écosse...

«Bien sûr que Shekhar a pris de grandes libertés avec les faits, renchérit Cate Blanchett. Il le faut pour faire de bonnes intrigues sur le plan dramatique. Personnellement, j'aime cette approche délibérément romantique qui est cristallisée par la notion de triangle amoureux. Nous avions ainsi l'occasion d'explorer l'univers intérieur de cette femme qui, dans les faits, n'a jamais pu quitter les rives de son patelin.»

Reste maintenant à savoir si, comme le souhaite Kapur, le dernier volet de sa trilogie - qui confronterait la souveraine à sa propre mortalité - verra le jour. Rien n'est moins certain. Pour toute réponse, l'actrice n'esquisse en effet pour l'instant qu'un sourire. De son côté, le cinéaste souhaiterait évidemment mettre en chantier cet ultime épisode le plus rapidement possible.

«J'espère quand même ne pas devoir attendre encore 10 ans! lance-t-il. En 2017, Cate sera certainement encore vivante mais moi, peut-être pas!»

Elizabeth - The Golden Age (Elizabeth - L'âge d'or en version française) prend l'affiche le 12 octobre.