Certains font des films pour s'acheter un condo. Stéphane Géhami, lui, a vendu son condo pour se payer son premier long métrage, En plein coeur.

Après plusieurs refus des institutions de financement du cinéma (SODEC et Téléfilm Canada), le Montréalais a entamé la production de son film, actuellement en tournage dans l'est de Montréal, a appris La Presse.

En plein coeur est une histoire d'amour entre Benoît (Pierre Rivard), la trentaine tourmentée, et un adolescent, Jimmy (Keven Noël). Benoît gagne sa vie en volant des voitures. Jimmy, lui, veut aider sa mère, dépressive, à joindre les deux bouts. Tous deux sont en quête d'amour. Benoît se perd dans les bras des femmes, et Jimmy, lui, s'accroche à ce père de substitution.

«Il y a bien des histoires de jalousie et de trahison. Dans le film, on suit la relation et la progression entre Benoît et Jimmy», dit Stéphane Géhami, qui s'était fait remarquer en 2001 avec son moyen métrage, Au hasard de l'amour.

Le scénario du film est signé par Stéphane Géhami et Héloïse Masse. Depuis trois ans, le tandem travaille sur ce projet de film. Depuis trois ans, le projet récolte de bons échos à la SODEC et à Téléfilm, et se fait refuser le financement à la production. «Tanné d'attendre», Stéphane Géhami décide, après le dernier refus, au début de l'été, de faire son film avec ses propres moyens et le soutien du Conseil des arts. «D'un côté, on était écoeurés, et de l'autre on était lucides: il fallait que le film se tourne là, dit-il. J'ai vendu mon condo, on a 150 000 $.»

Avec ce budget, il réunit plusieurs comédiens professionnels (Patrice Godin, Bénédicte Décary, Julie Deslauriers et Marie-France Marcotte) ainsi qu'une équipe technique. «C'est risqué, mais ça ne me fait pas peur», dit Stéphane Géhami.

Paiements différés

Pour joindre les deux bouts, tout ce beau monde accepte d'être payé en différé et de faire beaucoup... avec peu.

«On tourne avec une caméra numérique, en HD», mais, précise Stéphane Géhami, le film sera gonflé en 35 mm ensuite. Pour la postproduction et le montage, (assuré par Claude Palardy), il compte sur l'aide des institutions. Et en cas de refus? «On n'a pas le choix, il faut que ça marche», répond le réalisateur.

Au bout du compte, Stéphane Géhami espère réaliser un film qui parle du coeur des hommes plus que des vols de voitures, et voit son film comme un «mélange entre Cassavetes et Loach».

«C'est tourné à l'épaule, c'est ben freak», croit le réalisateur, qui entend frapper aux portes de festivals internationaux et québécois avec son film.

En plein coeur pourrait aussi prendre l'affiche au Québec. «J'ai envie de parler au plus de monde possible. Même si c'est un film à petit budget, ce n'est pas un film d'auteur. Je fais ce film pour le public», dit-il. Stéphane Géhami ne doute pas de la réussite de son projet. «Ce que je souhaite, évidemment, c'est faire le plus d'argent possible et d'aller dans des festivals», dit-il.