À quelques jours de la sortie mondiale de The Golden Compass (À la croisée des mondes - La boussole d'or en version française) de Chris Weitz, adaptation du premier tome de la trilogie de Philip Pullman, la boussole en question pointe en direction de la controverse religieuse.

Lors de rencontres de presse tenues dimanche à Londres, il était avant tout question du contenu d'une oeuvre où, selon divers groupes religieux - dont la Catholic League américaine - l'église catholique est dénigrée et l'athéisme, loué.

Le débat existe en fait depuis la publication de la série du romancier britannique, qui a toujours revendiqué son athéisme. Publiée entre 1995 et 2000 et vendue à 14 millions d'exemplaires dans le monde, la trilogie a d'ailleurs été bannie de certaines écoles américaines. La semaine dernière, la commission scolaire catholique de Halton, en Ontario, a elle aussi proscrit le livre de ses bibliothèques.

Bref, la polémique, jusqu'ici plutôt discrète, a pris de l'ampleur à l'approche de la sortie, le 7 décembre, de la superproduction... qui va attirer l'attention sur l'oeuvre controversée.

Celle-ci suit le destin de Lyra, qui évolue dans un monde parallèle où «l'Église exerçait un pouvoir absolu sur tous les aspects de la vie quotidienne», écrit Philip Pullman, et où chaque humain est attaché par un lien invisible à un «daemon», représentation physique de son âme qui a la forme d'un animal.

Fillette promise à un destin hors de l'ordinaire, Lyra se lance à la poursuite d'une mystérieuse organisation qui kidnappe des enfants et se livre à des expériences traumatisantes sur eux. Une organisation qui n'est pas étrangère au Magisterium, qui est dans le livre «le corps le plus actif et le plus redouté» de l'Église.

«Mais Pullman n'est pas contre la religion, il est contre l'abus de la religion liée au pouvoir politique, contre le fait de forcer les gens à croire, contre le fait d'accepter ce qui est dit sans réfléchir», affirme Chris Weitz, qui a scénarisé le livre après que New Line (le studio qui produit le film) eut refusé l'adaptation plus littérale de Tom Stoppard (Brazil, The Bourne Ultimatum).

Le scénario de Chris Weitz, lui, met la pédale douce sur les notions (anti) religieuses présentes dans le roman, a pu constater La Presse, qui a vu film. Par exemple, dans le long métrage, il n'est nulle part fait mention que le Magisterium représente la ligne dure de l'Église. Aucune mention, non plus, des notions de péché originel et de libre arbitre, si importants dans les livres.

Ici, nouvelle controverse... cette fois, parmi les fans de la trilogie qui accusent le studio d'avoir succombé à la pression et fait aseptiser l'histoire.

Si Chris Weitz reconnaît que New Line a craint que certains thèmes nuisent à ce film qui se veut familial et grand public - «Il a toujours été clair qu'à cause de l'investissement financier, le public du film devait être plus grand que celui du livre» -, la productrice Deborah Forte, elle, affirme que «si nous avons atténué le thème de la religion, ce n'est pas consciemment».

«Nous avons suivi le conseil de Philip Pullman pour le développement du scénario, poursuit-elle, et ce conseil était: collez-vous à Lyra. C'est son histoire et si le public comprend sa quête, vous aurez réussi.»

Reste à savoir comment la série va pouvoir être adaptée si les deuxième et troisième romans sont portés au grand écran, puisque les idées anticléricales originelles y prennent de plus en plus de place...

Chris Weitz a déjà des idées là-dessus. Et une réponse à ses détracteurs: «Le seul point sur lequel les extrémistes religieux ont raison, c'est qu'en effet, je serais ravi que plus de gens lisent le roman après avoir vu le film. Pas parce que j'aurais un ordre du jour athéiste - ce qui n'est pas le cas - mais parce que ce sont des textes littéraires magnifiques et brillants.»

___________________________________________________
Les frais de voyage de ce reportage ont été payés par Alliance (New Line).