Pour les besoins de son documentaire Homo Toxicus, Carole Poliquin a fait analyser son sang afin de connaître sa concentration en substances toxiques. À sa grande surprise, elle a découvert que son organisme renfermait des traces de mercure plus élevées que la moyenne.

Rien de dramatique, mais assez pour lui faire réaliser que ses cinq ou six repas hebdomadaires de poisson avaient entraîné des répercussions sur son organisme. Le mercure, ou une autre substance inconnue, était-il responsable de ses problèmes de glande thyroïde? Elle ne le saura jamais. Pour le reste, «c’est rassurant d’avoir des taux normaux de susbtances toxiques...» ironise-t-elle.

Homo Toxicus est le résultat des recherches de la documentariste pour brosser le tableau le plus vaste possible des répercussions des contaminants sur le corps humain. À travers les témoignages de plusieurs spécialistes d’ici et d’ailleurs, son film se fait l’écho inquiétant des effets sur le corps humain des 100 000 molécules chimiques disséminées dans l’environnement. Autant de pesticides, d’hormones, de métaux lourds et autres perturbateurs endocriniens dont les effets à long terme sur l’homme sont difficiles à prouver.

Carole Poliquin s’est rendue au Nunavut pour rendre compte de la forte intoxication des Inuits au BPC et au mercure. Ces concentrations comptent parmi les plus élevées au monde. La consommation de poissons contaminés est mise au banc des accusés.

«On ne le saura jamais, car chacun de nous est différent et les causes (des maladies) sont multi- factorielles», explique la cinéaste montréalaise, en entrevue au Soleil. «Chacun d’entre nous a son propre génome. C’est pour cette raison qu’il est si difficile de prouver l’effet d’une substance (sur l’éclosion d’une maladie). Les compagnies ont beau jeu en disant que si c’était leur produit le responsable, tout le monde serait malade. Or, nous ne sommes pas égaux devant l’environnement.»

Témoignages troublants

La réalisatrice a également fait un crochet dans la région de Sarnia, en Ontario, où une communauté amérindienne de la «Chemical Valley» vit entourée de raffineries et de centrales thermiques au charbon. Les effets des polluants ont entraîné chez les habitants une multitude de maladies, dont une augmentation importante des fausses couches. Fait intrigant : il naît dans cette région deux fois plus de filles que de garçons. Des observations sur des animaux démontrent d’ail­leurs une hausse alarmante de spécimens affligés de problèmes du système reproducteur. Encore là, le lien de cause à effet entre ces maux et la pollution est difficile à établir noir sur blanc.

Même si la cinéaste refuse d’être alarmiste, elle n’en demeure pas moins troublée par tout ce qui lui ont raconté les médecins et autres scientifiques — «pas des deux de pique». «L’un d’eux (le Dr Michel Fournier, titulaire de la chaire de recherche en toxicologie du Canada) dit que les effets endocriniens perturbateurs dans la nature risquent de se produire chez l’humain dans la deuxième ou troisième génération. Il y a des signaux que la nature, dans son intelligence, nous envoie.»

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Homo Toxicus est présenté au FC3A demain, à 12 h, au cinéma Cartier, et dimanche, à 15 h, à la salle Multi.