Elle a été surprise quand elle a su que la scénariste Isabelle Hébert avait pensé à elle pour le rôle d'une mère de famille qui, au milieu des années 60, quitte sa famille pour échapper à une réalité qu'elle ne peut confronter. Sur le plateau de Maman est chez le coiffeur Céline Bonnier s'est pourtant sentie comme dans son salon...

Céline Bonnier a fait la connaissance d'Isabelle Hébert il y a trois ans au Rwanda. La scénariste de Maman est chez le coiffeur était en effet chargée de réaliser le «making of» du film que Robert Favreau était en train de tourner là-bas, Un dimanche à Kigali.

«Quand Isabelle m'a contactée pour me dire qu'elle me verrait incarner le personnage de la mère dans l'histoire qu'elle était en train d'écrire, j'ai d'abord été intriguée, racontait cette semaine l'actrice en entrevue à La Presse. Quand j'ai lu le scénario, j'ai été ravie, mais aussi très étonnée qu'on pense à moi pour un personnage comme celui-là. Avant que le drame ne frappe, cette femme est très organisée, très sereine, très en contrôle. Elle ne génère pas de trouble. C'est tout le contraire de ce qu'on m'offre habituellement! De façon générale, on me propose davantage des personnages blessés de l'intérieur. Ce n'est pourtant pas le cas de cette femme.»

Dernière d'une famille de huit enfants, Céline Bonnier est à même de faire revivre une époque dont les souvenirs sont encore très vivaces dans son clan. «La façon de vivre qu'empruntent les personnages dans le film me ramène beaucoup à ma propre enfance. Léa est parvenue à recréer cet univers de façon magnifique. Elle touche à des choses qui sont encore palpables en chacun de nous.»

L'actrice est aussi bien consciente du fait que la femme qu'elle incarne dans le film, bien que tout à fait de son époque, est en avance sur son temps.

«Peu de femmes avaient alors l'excuse de la carrière professionnelle pour quitter une situation qui les rendaient malheureuses, explique celle qui, l'an dernier, a obtenu le Jutra de la meilleure actrice grâce à sa performance dans Délivrez-moi. Comme cette mère de famille est prise dans une problématique très difficile à confronter à cette époque-là, elle profite de son statut de journaliste pour partir. Quitte à revenir probablement plus tard mais cela, l'histoire ne le dit pas.»

Toujours maintenu à hauteur d'enfants, le récit s'attarde ainsi à mesurer les conséquences de cette absence maternelle auprès de ceux qui restent derrière.

«Ce qu'il y a de particulièrement beau dans cette histoire, c'est que le spectateur n'est jamais dans la douleur de l'adulte, observe la comédienne. Bien que l'absence de la mère se fasse sentir de façon très douloureuse, on demeure quand même dans la poésie de l'enfance.»

À l'instar de la réalisatrice, Céline Bonnier a préféré ne pas trop poser de questions sur les sources de cette histoire. «Je préfère toujours nourrir un personnage à partir de moi-même, explique-t-elle. À mon avis, il n'est jamais souhaitable que les réponses viennent des autres!»