Quatorze des 22 films en compétition ayant déjà été présentés, quelques rumeurs commencent à circuler en vue de la composition du palmarès que dévoilera dimanche le jury présidé par Sean Penn.

Le président, rappelons-le, avait déjà affiché ses couleurs la semaine dernière en déclarant qu’à ses yeux - et à ceux des autres membres du jury - un film digne d’une Palme d’or serait réalisé par un cinéaste qui tient compte de «l’époque dans laquelle il vit, et du monde qui l’entoure.» Considérant ce point de vue, et aussi à cause de l’excellente qualité du film, bien des festivaliers estiment que Waltz with Bashir, présenté dès le deuxième jour de la compétition, répond parfaitement aux critères établis par ce jury.

Le documentaire d’animation, réalisé par l’auteur cinéaste israélien Ari Folman, emprunte en effet la forme d’un journal intime, tenu par un cinéaste qui, pour confronter un épisode traumatisant de sa vie de jeune soldat au Liban, part à la trace de sa mémoire effacée. Waltz with Bashir devient ainsi un portrait impressionniste poignant, l’animation octroyant au récit un grand pouvoir d’évocation. S’appuyant sur les véritables témoignages des ses anciens compagnons d’armes, Folman s’engage dans une introspection bouleversante.

Même si à peu près tout le monde estime que Bashir doit figurer au palmarès d’une façon ou d’une autre, aucun film n’est pourtant encore établi favori pour le titre suprême. Des films très appréciés, du moins par la presse, peuvent aussi espérer certaines récompenses.

Étonnamment, le film le mieux coté jusqu’à maintenant par les journalistes sondés par le magazine spécialisé Screen International est Les trois singes de Nuri Bilge Ceylan. D’une beauté picturale indéniable, le nouveau film du réalisateur de Uzak n’a pourtant pas fait l’unanimité.

Tout de suite après, quatre films obtiennent la même cote : The Exchange de Clint Eastwood, une fresque de facture classique mais très bien conçue et réalisée; Le silence de Lorna de Luc et Jean-Pierre Dardenne; Waltz with Bashir d’Ari Folman; de même que 24 City de Jia Zhangke, ce documentaire-fiction tourné à Chengdu, l’endroit même où a récemment eu lieu un terrible séisme.

Refoulé à l’entrée de la projection de 24 City, en compagnie de quelques centaines de collègues (dont plusieurs journalistes chinois en colère), le représentant de La Presse aura l’occasion de rattraper ce film au dernier jour du Festival

Fait à noter à propos d’Un conte de Noël d’Arnaud Desplechin : ce film noir sur la famille est autant apprécié par la presse francophone que la presse internationale. Il est en effet assez surprenant que cette comédie dramatique, de facture très française, n’ait pas divisé la critique de la même manière que le font habituellement les productions issues de l’Hexagone.

Two Lovers, de James Gray, a par ailleurs d’ardents défenseurs, mais aussi de très fervents détracteurs. La nature même du film, qui se concentre sur une histoire d’amour, exclut par ailleurs d’emblée ce drame sentimental de la liste des candidats sérieux. Il pourrait toutefois être considéré pour les prix d’interprétation.

En fond de grille, toujours selon la presse internationale, Blindness de Fernando Meirelles, présenté le soir de l’ouverture, et Serbis, ce pétard mouillé faussement branché du Philippin Brillante Mendoza.