Saviez-vous qu'il existe du black metal chinois? De death metal indonésien? Sam Dunn non plus. En tant qu'auteur du documentaire Metal: A Headbanger's Journey, il est pourtant un spécialiste du métal. Pour son deuxième film, Global Metal, l'anthropologue et cinéaste canadien refait ses bagages et montre comment les guitares qui sonnent comme une tonne de briques servent d'exutoire à des jeunes vivant aux quatre coins du monde.

Sam Dunn est tombé dans le heavy metal au tout début de son adolescence. Longtemps avant de décrocher un diplôme en anthropologie, il se brassait la tignasse en écoutant Iron Maiden, Sepultura, Slayer et Metallica. Sauf qu'il ne se reconnaissait pas du tout dans ce cliché voulant que les amateurs de métal soit des mangeurs de chauves-souris ou des suppôts de Satan. Caméra à l'épaule, il a décidé de montrer un autre point de vue.

Son premier film, Metal: A Headbanger's Story, paru en 2005, constitue une apologie du heavy metal. Sam Dunn en relate la naissance, l'évolution esthétique, en démontre la complexité et en explore les fondements socio-économiques. Habile, instructif et partisan, comme un plaidoyer. «Les parodies avaient déjà été faites, explique-t-il, pour justifier le ton de ce film réalisé avec Scot McFayden. On sentait qu'il y avait une autre façon de voir les choses qui n'avait jamais été présentée.»

Les deux hommes ne se doutaient toutefois pas qu'il venaient d'ouvrir une espèce de boîte de Pandore. Des fans des quatre coins du monde leur ont écrit. Vraiment des quatre coins du monde: Sam Dunn et Scot McFayden ont reçu des courriels de «metalheads» de l'Inde, de la Chine, de l'Indonésie et même de l'Iran. Estomaqués de constater la portée de cette musique hors de l'Occident, ils ont décidé de lui consacrer leur deuxième film, l'intriguant Global Metal.

Les riffs de la liberté
«Ce qui était intéressant, c'était d'explorer comment le métal avait affecté ces autres endroits, raconte Scot McFayden. La musique pop a, de toute évidence, l'avantage de se retrouver à la télé, à la radio et dispose de toutes sortes d'outils pour se faire connaître, alors que le métal s'est propagé un peu à l'insu des gens, d'une manière plus underground. On a été surpris de l'ampleur de sa diffusion dans la mesure où il ne dispose pas des mêmes outils.»

Sam Dunn a donc refait ses bagages et guide le spectateur dans la communauté métal internationale. Sac au dos, il se rend d'abord au Brésil rencontrer l'une de ses idoles de jeunesse, Max Cavalera, de Sepultura. Là, il apprend que le heavy métal est arrivé dans ce pays d'Amérique du Sud presque en même temps que la démocratie, en 1985. Iron Maiden, Ozzy et Scorpions étaient du premier Rock In Rio, festival tenu au moment même où le pays élisait son premier président civil en 20 ans.

Dès leur première escale, les réalisateurs mettent en place l'équation qui deviendra le fil conducteur du film: heavy métal = liberté. «On parle de liberté d'expression, de liberté au plan personnel», précise Scot McFayden. En Iran (où il est banni) ou en Chine, le heavy metal est perçu comme une forme d'exutoire, un lieu qui permet d'exprimer des sentiments qu'on n'exprime généralement pas publiquement ou carrément de s'affranchir de traditions culturelles jugées oppressantes.

Metal: A Headbanger's Journey montrait déjà comment le heavy metal pouvait donner un sentiment d'appartenance à des gens qui se sentent isolés. «Ce qu'on a appris en faisant ce film et en rencontrant des gens qui vivent dans des pays où il y a eu des troubles importants, c'est que le métal est bien plus que ça, dit encore Scot McFayden. Les gens au Moyen-Orient peuvent détester George Bush et trouver l'Occident impérialiste, mais le métal compte vraiment pour eux.»

Sam Dunn admet que la mondialisation constitue souvent un danger pour la diversité culturelle. Souvent, le rouleau compresseur de la culture occidentale écrase tout jusqu'à remplacer des éléments de la culture locale. L'avènement du métal dans des pays comme l'Inde, l'Indonésie et les autres pays qu'il a visités constitue selon lui un cas particulier. «Ce n'est pas comme si ces cultures avaient développé quelque chose comme le métal, un exutoire pour les jeunes, constate-t-il. Le métal ne prend pas la place de ce qui existait déjà, il remplit un vide.»

Global Metal est présentement à l'affiche au Cinéma du Parc en version originale anglaise et en version française.