Il se voyait déjà adulé et riche. Il s'imaginait dans une voiture de luxe, aux côtés d'une plantureuse blonde au nom imprononçable. Il fantasmait sur toutes les files d'attente qu'il n'allait plus avoir à faire. Benoît Roberge était un cas dans les capsules web qui ont fait sa renommée. Ses trois meilleurs amis aussi. Ils le sont toujours dans le film réalisé par Raphaël Malo, scénarisé par ses soins et ceux de Stéphane E. Roy et Jean-Michel Dufaux.

C'est l'histoire d'un groupe de chums, (assez) jeunes, (relativement) beaux et (moyennement) riches: les personnages de Benoît, Sébastien, Stéphane et Jean-Michel retrouvent, pour le grand écran, les problématiques qui les animent dans les capsules web du Cas Roberge.

«Le film voulait parler du showbiz, et je pense que par la suite, il y a des thèmes universels, comme la recherche du bonheur, qui ont émergé. C'est aussi un film sur l'amitié entre garçons. Tout le monde peut y trouver son compte», assure l'homme de télé et de radio Sébastien Benoit, qui est du film comme des capsules.

Les fidèles des capsules du Cas Roberge, diffusées sur l'internet depuis plus d'un an, retrouveront en effet dans le film des personnages qu'ils connaissent déjà bien. Benoît (Benoît Roberge) est un chroniqueur télé, qui espère trouver sa place au sein de l'aréopage médiatique du Plateau.

Son ami Sébastien (Sébastien Benoit) est, au dire de son interprète, l'animateur «saveur du mois, l'homme du moment», l'homme aux dents blanches, qui plaît à ceux que le marketing appelle les «adultes contemporains». Plein de lui-même, il espère toutefois que sa gloire rejaillira sur Benoît Roberge.

Jean-Michel (Jean-Michel Dufaux), est une ancienne «saveur du mois», qui a délaissé les contingences matérielles pour s'élever dans les hauteurs de la pensée bouddhiste: un recul qu'il conseille à Benoît. Enfin, Stéphane (Stéphane E. Roy) est un scribouillard compulsif qui se voit comme le fils spirituel d'Hemingway. Il embarque Benoît pour une retraite d'écriture en Abitibi sur les traces du fondateur de la Nouvelle Vague, Jean-Luc Godard.

«Benoît se cherche, mais en attendant, il a envie de s'amuser. Il veut faire des trucs qui le nourrissent, mais il n'a pas pris la bonne voie. Il a un gros ego, il pense qu'en allant s'isoler, il va écrire un scénario. Oui, tu peux écrire une oeuvre, mais ça demande des efforts», analyse Benoît Roberge.

La recherche désespérée de Benoît suscite mésententes et malentendus. Autour de leur cas préféré, Benoît Roberge, Jean-Michel Dufaux et Stéphane E. Roy ont concocté un scénario à partir des ingrédients qui ont fait le succès des capsules: des invités vedettes (Marie Plourde, Jean-Thomas Jobin ou Guillaume Vigneault) et s'insistent-ils, une bonne dose d'ironie.

«On est très sarcastiques envers nous-mêmes, très critiques», dit Stéphane E. Roy. «C'est un film aussi sans prétention, avec beaucoup d'autodérision», affirme, de son côté, Jean-Michel Dufaux. Le milieu artistico-médiatique montréalais n'est pas épargné, même si Benoît Roberge juge aujourd'hui ne pas avoir été «assez dur».

Si Le cas Roberge parle beaucoup de l'univers impitoyable de la télévision, c'est en toute connaissance de cause. Le réalisateur Raphaël Malo compte plusieurs émissions de télé à son actif, Benoît Roberge a lui aussi oeuvré comme chroniqueur (Caféïne) ou scripteur (Loft Story). Stéphane E. Roy, enfin, est bien connu des fans de l'émission Caméra Café.

À l'origine, le concept du Cas Roberge était d'ailleurs destiné à la télévision, avant d'être transformé en projet de film chez GO Films puis de débarquer sur la toile. Tourné en HD, pendant 18 jours avec un budget de 1,3 million, le long métrage garde dans sa réalisation et sa facture la spontanéité des capsules.

«Tout le film est tourné dans un ton très réaliste. Je ne voulais pas y aller de façon léchée. Un seul plan est fait au trépied, tout le reste est à l'épaule. C'était voulu comme ça: c'est un peu rough. C'est comme Benoît: c'est pas parfait, c'est très réel», explique Raphaël Malo.

Du côté du scénario, les scènes du Cas Roberge sont rythmées par les blagues des personnages, à la manière de certaines émissions de télévision. «Il y a plein de réalisateurs, en Espagne ou en France, qui commencent à faire ça, des films qui rebondissent beaucoup. C'est pas de la télé, mais ça y ressemble dans les punchs», explique Stéphane E. Roy.

«C'est un film qui marche bien avec une petite équipe, caméra à l'épaule; on a le premier jet de sincérité, de rapidité. C'est pas mal le film qu'on voulait faire», croit, de son côté, Jean-Michel Dufaux.

Le cas Roberge prend l'affiche le 15 août au Québec