Les festivaliers commenceront aujourd'hui à se remettre un peu de la folie des premiers jours. Au milieu de toutes les productions de prestige proposées au cours du premier week-end, quelques Québécois ont réussi à se distinguer, dont trois auteurs cinéastes.

Il y a trois primeurs québécoises au Festival de Toronto cette année. Moins de deux heures avant la toute première projection publique de C'est pas moi, je le jure!, la première d'entre elles, Philippe Falardeau ne cachait pas sa nervosité.

«Quand nous sommes venus au Festival de Toronto avec Congorama il y a deux ans, la situation était différente, explique le cinéaste. Comme nous avions déjà présenté le film à Cannes quelques mois auparavant, plusieurs acheteurs l'avaient déjà vu; certains l'avaient même déjà acheté. Nous avions déjà une idée du genre d'accueil auquel nous pouvions nous attendre. Avec C'est pas moi, je le jure!, tout est à faire. Le film est présenté devant un public pour la première fois, devant une salle de 900 personnes. Je ne pourrai pas m'empêcher d'observer la réaction des gens, même si les réactions d'un public anglo-saxon sont habituellement très différentes des nôtres!»

Quand on lui demande pourquoi un lancement au Festival de Toronto se révèle si stratégique, Falardeau évoque la notion de fidélisation. «Quand les programmateurs du TIFF adoptent un cinéaste, ils aiment suivre son évolution. Et puis, on ne choisit pas de venir à Toronto. C'est Toronto qui choisit. Et qui nous invite. Comme tous les professionnels du cinéma se retrouvent ici, une présentation ne peut être qu'à l'avantage du film.»

Recroisé le lendemain de la première, Falardeau affichait alors un grand sourire. «Je suis content; cela s'est bien passé. Antoine (L'Écuyer) a même eu droit à une ovation!» a-t-il lancé, visiblement ravi.

Même si elles n'obtiennent pas nécessairement la même attention médiatique que les «gros» films américains, les productions québécoises parviennent quand même à se faire remarquer. La Presse a notamment pu assister à la première projection publique de Lost Song, le nouveau film de fiction de Rodrigue Jean (Full Blast, Yellowknife), présenté aussi en première mondiale. La salle 4 du cinéma Varsity était pratiquement pleine de spectateurs attentifs et respectueux, prêts à compatir au drame difficile dans lequel Jean les entraîne. La chanteuse Suzie LeBlanc, remarquable dans son premier rôle au cinéma, incarne une jeune mère qui, après la naissance de son petit garçon, sombre dans une dépression dont la nature inquiète tout son entourage, à commencer par son conjoint (Patrick Goyette). Allant au bout de sa démarche, l'auteur cinéaste offre ici son film le plus abouti et force le spectateur à s'interroger sur le sens de la vie.

D'une certaine façon, les protagonistes de Derrière moi s'interrogent aussi sur le sens de la vie. La démarche qui sous-tend le plus récent film de Rafaël Ouellet est plus radicale, dans la mesure où le réalisateur du Cèdre penché s'attarde aux dérives existentielles d'une jeune femme mystérieuse (Carina Caputo) et d'une adolescente (Charlotte Legault), dans un bled pourri où le seul désir est celui d'aller ailleurs. Tant dans le propos que dans la manière, c'est à la fois beau et insupportable.

Jouer avec la mort

Pascale Bussières a par ailleurs fait le voyage à Toronto pour accompagner la présentation d'Afterwards, une coproduction franco-québécoise tournée en anglais. Réalisé par Gilles Bourdos (Inquiétudes), ce drame, tiré du roman de Guillaume Musso, s'attarde à décrire le parcours d'un avocat new-yorkais d'origine française (Romain Duris) qui, 20 ans après avoir chappé à la mort, voit mystérieusement débarquer dans sa vie un médecin (John Malkovich) ayant le don de pressentir la disparition de certaines personnes.

L'actrice québécoise y incarne une serveuse canadienne d'origine russe, dont la présence est déterminante pour la suite des choses.

«Jouer en anglais avec un accent russe ne relevait pas de l'évidence, mais je crois quand même avoir une assez bonne oreille pour en capter les sonorités, expliquait hier l'actrice au cours d'une entrevue accordée à La Presse. Et puis, on m'a fait travailler avec une coach, une dame d'origine russe absolument magnifique!»

Bien que son rôle soit secondaire, Pascale Bussières a accepté avec enthousiasme d'être de l'aventure.

«D'abord parce que le scénario est très beau. Ensuite, parce j'avais l'occasion de donner la réplique à Romain Duris, un acteur que je connais depuis longtemps, mais avec qui je n'avais pas encore eu l'occasion de travailler.»

Afterwards devrait en principe prendre l'affiche chez nous au début de la prochaine année.

Rappelons que Borderline, Maman est chez le coiffeuret Un été sans point ni coup sûr, déjà sortis chez nous, font aussi partie des films québécois sélectionnés à Toronto.