Après avoir tourné à Londres, Saint-Pétersbourg et Barcelone, Cédric Klapisch avait envie de retrouver ses racines, dans la capitale française. Avec Paris, qui sort ce vendredi sur les écrans québécois, le réalisateur de L'Auberge espagnole assouvit son désir en nous plongeant dans un film choral où l'on suit avec plaisir différents personnages dont les destins s'entrecroisent.

Pierre (Romain Duris) est un danseur qui vient de découvrir qu'il souffre d'un problème cardiaque. Il doit renoncer à sa passion et risque même de mourir, la transplantation cardiaque qu'il doit subir n'étant pas sûre de réussir. De la fenêtre de son appartement, il se met alors à regarder les passants et ses voisins, et la vie prend pour lui une saveur nouvelle.

Dans les rues de son quartier, on découvre peu à peu des gens qui, parfois sans même se connaître, sont liés les uns aux autres. Il y a d'abord sa soeur, Elise (Juliette Binoche, émouvante), qui vient lui tenir compagnie avec ses trois enfants. Il y a aussi sa boulangère un peu raciste (Karin Viard), les maraîchers du quartier et sa jeune voisine (Mélanie Laurent) convoitée par un des professeurs de sa faculté (Fabrice Lucchini).

Réalisateur de succès tels que Le Péril jeune et Les Poupées russes, Cédric Klapisch s'appuie dans ce nouveau film sur un casting assez exceptionnel, avec notamment deux acteurs qui avaient déjà joué dans son premier long métrage, Riens du tout : Karin Viard, qui semble se délecter de sa composition, et Fabrice Lucchini, survolté, qui apporte une dose d'humour bienvenue dans une histoire qui pourrait facilement sombrer dans la tristesse et la mélancolie. À noter notamment une scène de danse particulièrement cocasse avec Mélanie Laurent.

À l'opposé, on se sent gagné par l'émotion dans l'une des dernières séquences, mettant face à face Romain Duris, acteur fétiche de Klapisch, et Juliette Binoche. D'autres épisodes provoquent des sentiments divers, qu'il s'agisse de l'itinéraire d'un émigré clandestin africain qui rêve de Paris, des problèmes existentiels d'un architecte (François Cluzet) ou des pérégrinations entre Ménilmontant et Rungis de plusieurs maraîchers, incarnés par Albert Dupontel, Gilles Lellouche, Zinedine Soualem et Julie Ferrier.

Le cinéaste s'offre lui-même une brève apparition dans une scène où il a recours à des images de synthèse pour dévoiler un projet immobilier. Klapisch s'amuse aussi à montrer le «côté râleur» des Parisiens. «C'est aussi une spécificité française: le héros français à la Gabin ou à la Delon, ou même les personnages de Céline, Léo Malet ou Tardi. Chez eux, le Parisien tire la gueule, a du vague à l'âme, il n'est pas dupe et il est révolté... Il y a aussi quelque chose de beau et d'assez sain dans cette attitude», remarque le réalisateur.

En plus de la performance de tous les acteurs, servis par des dialogues qui sonnent juste dans une succession de petites histoires simples, la capitale française, qui sert de décor, en est un des éléments essentiels. Si le début du film est un peu lent et si le scénario reste assez classique, on s'attache peu à peu aux personnages de Paris, et on les suit avec délectation dans leurs déambulations, en s'immisçant brièvement dans leur quotidien. En espérant peut-être retrouver un jour ces héros ordinaires, pleins d'humanité, comme on avait revu les protagonistes de L'Auberge espagnole dans Les Poupées russes.