Olivia Harrison, veuve du Beatle George, craignait que All Together Now ne dévoile trop le contenu du spectacle LOVE du Cirque du Soleil.

Le metteur en scène Dominic Champagne trouve que ce film ne raconte pas vraiment comment son show s'est fait. Mais tous sont d'accord: All Together Now, présenté ce soir en première québécoise au Festival du nouveau cinéma, privilégie l'émotion plutôt que de s'en tenir à la formule convenue d'un making-of.

All Together Now, titre d'une chanson hop-la-vie des Beatles (Yellow Submarine), n'est pas le making-of du spectacle LOVE que donne le Cirque du Soleil à Las Vegas depuis deux ans. «Moi, les making-of, ça ne m'intéresse pas», dit d'ailleurs le réalisateur Adrian Wills, un collaborateur fréquent du Cirque qui a signé le documentaire primé Entre les mains de Michel Tremblay.

 

Le film de Wills suit les étapes de la gestation de LOVE, fruit d'un consensus artistique entre deux entreprises qui n'ont jamais cédé un millimètre de leur contrôle créatif: les Beatles et le Cirque. La caméra se promène à Montréal, à Londres et à Las Vegas où l'auteur et metteur en scène Dominic Champagne doit composer avec les hésitations, les conseils et les critiques mais aussi les encouragements d'Olivia Harrison, Yoko Ono, Paul McCartney et Ringo Starr.

«Pour moi, All Together Now, c'est comme une réponse au film Let It Be, qui portait un peu sur la rupture des Beatles, explique Wills. Les Beatles, comme n'importe quelle famille, ont connu des chicanes, la mort, et ils se rassemblent parce qu'ils sont liés par l'histoire, par ce qu'ils ont fait ensemble.»

All Together Now c'est aussi des anecdotes et des témoignages dont raffoleront les fans des Beatles: McCartney qui rappelle à George Martin la fois où les Beatles l'ont dirigé en studio pendant qu'il jouait de l'harmonium sur Being for the Benefit of Mr. Kite, Martin qui raconte que John Lennon-le-perfectionniste aurait voulu réenregistrer toutes ses chansons, surtout Strawberry Fields, la préférée du réalisateur.

Mais All Together Now, c'est d'abord, pour Wills et Champagne, l'histoire touchante de George Martin et de son fils Giles réunis dans cet ultime projet. «George est devenu le réalisateur des Beatles à 36 ans, rappelle Wills. À 36 ans, son fils Giles jette un regard sur ce que son père a fait et l'aide dans son travail parce qu'il est en train de perdre l'ouïe. Je trouve ça d'une beauté extraordinaire.»

Les tensions

Dominic Champagne ne cache pas qu'il y a eu des tensions créatrices en cours de production de LOVE. «Mais dans le film, on a l'impression que Yoko haït le show, pourtant elle en a été l'un des plus grands supporteurs. Mais c'est bien que le réalisateur ait eu un point de vue et au bout du compte, l'émotion générale qui s'en dégage me fait très plaisir.»

Pour Champagne, monter LOVE n'a pas été facile, ni laborieux. Il redoutait Paul McCartney avant de le rencontrer, il a découvert quelqu'un qui «connaît le geste créateur»: «Au départ, Paul parlait du projet de George (Harrison), c'est ensuite devenu votre projet (Giles, George et moi), puis notre projet. Le lendemain de la première, aux journalistes, Paul disait my show (rires).»

Yoko Ono et Olivia Harrison sont plus présentes dans le film que Paul et Ringo. «Oui, nous étions très protectrices, nous voulions assister à chaque étape de la production du spectacle, confirme Olivia depuis Los Angeles.»

«C'est très difficile de deviner ce que George et John auraient voulu, mais nous avions toutes deux une idée assez précise de ce qu'ils n'auraient pas aimé!»

«C'était un pari risqué, reconnaît Champagne. Il ne fallait pas voler la vedette aux Beatles. Je n'aurais pas voulu que John Lennon se dise: Voyons donc, je ne voulais pas finir à Vegas de cette manière-là!»

Olivia Harrison s'imaginait aussi la réaction de son défunt mari. Il a fallu l'intervention de leur fils Dhani pour qu'elle accepte qu'on utilise la version dépouillée de l'Anthology de While My Guitar Gently Weeps plutôt que celle de l'album blanc des Beatles: «J'entendais George, vraiment agacé, me dire: Tu prends ma maquette dans le show? Merci beaucoup!»

Puis, vers la fin de LOVE, Olivia a été bouleversée par le sourire sur grand écran du jeune George, le parfait sosie de Dhani: «George nous regarde, il nous sourit et c'est comme s'il nous disait: C'est correct, vous avez tous fait du bon travail.»

Après sa présentation, ce soir à 19 h 30 au cinéma Impérial, All Together Now prendra l'affiche du Cinéma du parc dès demain. Le DVD du film, avec quelques reportages supplémentaires, sera en vente le 21 octobre. «Mais moi, je trouve important que ça sorte en salle, dit Wills. Le son en 5.1, ça pète, et les images prennent une tout autre dimension.»