Pierre Richard aime le Québec, la neige et l'hiver. Le producteur-scénariste Guy Bonnier et le réalisateur Robert Ménard aiment Pierre Richard. Et lui offraient tout cela sur un plateau d'argent... oups, de tournage. Le bonheur, quoi. Pour accoucher du Bonheur de Pierre.

Passez de la Basse-Côte-Nord au Saguenay. Déménagez de Sainte-Marie-la-Mauderne à Sainte-Simone-du-Nord. Élisez Rémy Girard comme maire au lieu de Raymond Bouchard. Choisissez l'hiver plutôt que l'été. Unissez les forces locales... non pour retenir un «étrange», mais pour le faire fuir. Résultat: un genre de reflet inversé de La grande séduction de Jean-François Pouliot, c'est-à-dire Le bonheur de Pierre de Robert Ménard.

Le Pierre du titre ne se prénomme pas ainsi par accident: «Guy Bonnier a écrit le scénario en pensant à Pierre Richard», dit le réalisateur de Cruising Bar, qui est arrivé à bord du navire il y a deux ans. Cela faisait alors quatre ans que le projet était dans les airs et que le scénario subissait les transformations d'usage. Entre autres, pour satisfaire «le grand blond» qui y serait en vedette - et ne voulait pas être... qu'«un grand blond». «Il aimait l'idée, la proposition, mais il était important pour lui que l'histoire présente un équilibre entre la comédie et l'émotion, poursuit le réalisateur. Il a été très patient.»

Joint au téléphone à son bureau parisien, l'acteur confirme son intérêt de longue date pour le projet, intérêt qu'il teinte d'une couleur inattendue: «Ici, en France, on connaît Montréal et Québec. Et on connaît Chicoutimi... mais, souvent, de nom seulement. Et c'est un nom qui a quelque chose de mythique pour nous. Il fallait voir les yeux des gens s'écarquiller quand je disais que j'allais tourner là-bas!» En plein hiver, en plus.

Puisque, tourné en janvier 2008, Le bonheur de Pierre se déroule... eh bien, en janvier 2009! On y suit un professeur de physique quantique qui hérite de sa tante une auberge située à Sainte-Simone-du-Nord, village fictif qui s'appelle en réalité Sainte-Rose-du-Nord et se trouve à 45 minutes de voiture de Chicoutimi-la-mythique.

Accompagné de sa fille Catherine (Sylvie Testud, dans sa première comédie), journaliste de mode branchée à Paris, Pierre Martin se pointe au village, du bonheur plein les bagages - virtuels, les bagages, les vrais ayant été perdus en cours de transport - et le désir de faire copain-copain avec la population locale. Qui ne l'entend pas de cette oreille. Enfin, pour ce qui est du maire Michel Dolbec (Rémy Girard), qui désire mettre la main sur la fameuse auberge. Et magouille pour que sa femme (Louise Portal), son fils (Patrick Drolet) et ses électeurs (entre autres, Jean-Nicolas Verreault, Gaston Lepage, Diane Lavallée) lui donnent un coup de pouce dans ce sens.

C'est sans compter sur le caractère téflon de Pierre. Sur lui, rien ne colle - surtout pas la colère des autres. «Il est prédisposé au bonheur, sa joie de vivre est inaltérable, il est d'un optimisme tel qu'il retourne toutes les situations à son avantage, il a conservé intact ce caractère enfantin que l'on perd petit à petit en vieillissant», explique Pierre Richard.

Autant de caractéristiques que le personnage voudrait communiquer à son entourage, à sa fille en particulier. Aussi à l'aise dans cette nouvelle vie qu'un chien dans un jeu de quilles. Une relation père-fille qui a permis, justement, l'insertion de ces touches d'émotion auxquelles tenait le comédien, souligne Robert Ménard qui a rencontré Pierre Richard à Paris avant de s'atteler au projet: «Il fallait que ça clique entre nous. Ça a cliqué quand je lui ai dit que je ne venais pas chercher «le grand blond» mais l'acteur que je sais qu'il est.»

Toute une aventure

Ils ont donc retravaillé ensemble le scénario, avec Guy Bonnier (lequel se rendra à Paris au début du mois de mars pour discuter d'une sortie française du film) qui, de son côté, s'attardait aussi à monter le financement du projet - c'est-à-dire les 7,5 millions nécessaires, qui proviennent finalement en quasi-totalité du privé.

Et ça a été le début d'une aventure qu'ils ont particulièrement appréciée. «Rémy et moi avons eu un plaisir fou à jouer ensemble, dit Pierre Richard. Et comme j'avais peu de scènes avec Louise Portal, Gaston Lepage et les autres, j'assistais parfois aux lectures, par plaisir. Je mourais de rire simplement à les entendre!»

Il faut dire qu'il y a du Pierre Martin en Pierre Richard. «Oui, je pense être doué pour le bonheur. Vous me direz que je fais partie des privilégiés et que je n'ai pas grand mérite à cela mais... je connais des privilégiés qui se complaisent dans le malheur.» Pas lui. L'hiver «canadien», il l'a adoré - «j'ai eu plus froid en mai en Bretagne qu'en janvier au Saguenay!» - au point de ne jamais rechigner à aller dehors. «Nous avons seulement dû lui interdire de partir en motoneige ou en traîneau à chiens, pour des raisons d'assurances», pouffe Robert Ménard

Ce qui n'a même pas affecté le bonheur de ce Pierre-là.

Le bonheur de Pierre prend l'affiche le 27 février.