Borderline et Ce qu'il faut pour vivre sont les deux grands gagnants de la soirée des Jutra. Cumulant sept Jutra, les films de Lyne Charlebois et Benoît Pilon ont éclipsé Tout est parfait, C'est pas moi, je le jure! et Maman est chez le coiffeur, qui ont tous trois dû se contenter d'une mince récolte.

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Lyne Charlebois a créé la surprise en remportant le Jutra de la meilleure réalisation pour Borderline. «Je suis ébaubie, je tombe des nues», a-t-elle dit, paraphrasant Molière. «Je n'ai pas vraiment préparé quelque chose. Mon prix, je l'ai gagné quand mon producteur m'a appelé pour faire un film. Ça, c'est la cerise.»

Lyne Charlebois est la première femme à remporter le Jutra de la meilleure réalisation. «Je suis contente d'être une femme ce soir. J'espère que je vais ouvrir le chemin, mais je n'ai pas non plus la prétention de le faire», a dit la réalisatrice, visiblement ravie du succès remporté par son premier film.

L'autre favori de la soirée, Ce qu'il faut pour vivre, de Benoît Pilon, a remporté de son côté les Jutra du meilleur film et du meilleur scénario. «Je tiens à remercier tous les artisans de l'industrie pour l'honneur accordé à Ce qu'il faut pour vivre», a dit le producteur du film, René Chénier, de l'ACPAV.

«Je n'aurais pas de Jutra à mettre sur ma tablette, mais je suis très fier que vous ayez choisi notre film», a dit un Benoît Pilon tout sourire. Le documentariste a toutefois été récompensé pour sa participation au scénario, aux côtés de Bernard Émond. «C'est vraiment le scénario de Bernard, et je veux lui rendre hommage ce soir», a-t-il souligné.

Ce qu'il faut pour vivre s'est aussi distingué du côté de l'interprétation. Natar Ungalaaq a ainsi remporté le Jutra du meilleur acteur. «C'est une surprise: cela me touche beaucoup, et c'est merveilleux», a humblement affirmé le comédien inuit.

Borderline a raflé la mise du côté des interprétations féminines pour les prestations d'Isabelle Blais et d'Angèle Coutu (rôle de soutien). «Ça a été une aventure incroyable: des rôles comme ça, il n'y en a pas beaucoup dans une carrière», croit Isabelle Blais, qui n'a pas manqué non plus de remercier Lyne Charlebois pour son talent et sa vision.

L'interprétation de Normand D'Amour dans Tout est parfait a donné au film son unique prix, le Jutra du meilleur acteur dans un rôle de soutien. Accueilli par une salve d'applaudissements, D'Amour a remercié les artisans du film ainsi que sa famille et son propre père. «C'est sûr qu'il me voit d'en haut», a-t-il dit.

C'est pas moi, je le jure!, de Philippe Falardeau, l'un des chouchous des Jutra, est reparti avec un seul prix dans ses poches: celui de la meilleure direction-photo remis à André Turpin. Si l'on fait exception du prix du film s'étant le plus illustré hors Québec, Maman est chez le coiffeur, de Léa Pool, n'est reparti qu'avec un prix technique, celui de la meilleure coiffure.

Cinq trophées pour Babine

En terme de statuettes, Babine, de Luc Picard, est le film le plus nommé et le plus récompensé de cette 11e soirée des Jutra. En plus des quatre prix remis lors du gala hors d'ondes, Babine a été retenu hier pour sa trame sonore composée par Normand Corbeil et Serge Fiori.

Du côté des remerciements, peu de discours se sont éloignés des figures imposées. Seul Patricio Henriquez, récompensé pour son documentaire Sous la cagoule, un voyage au bout de la torture, a sacrifié les habituels remerciements à sa famille pour s'élever contre «l'obscurantisme» dont fait preuve Ottawa. «La culture québécoise est menacée: il y a une sorte de guerre déclarée contre cette culture, croit-il. Ce n'est pas la culture comme une rubrique de journal, ce ne sont pas juste les artistes: c'est une menace contre la culture comme expression citoyenne.»

Rare moment d'émotion, aussi, quand Fernand Dansereau s'est vu remettre le prix hommage. Entouré, sur scène, de Marina Orsini, Marie Tifo, Pierre Curzi, Janine Sutto, le scénariste des Filles de Caleb ou le réalisateur du récent La brunante, a remercié les comédiens et comédiennes qui lui ont permis de réaliser ses rêves et ses personnages.

Remis pour la première fois en ondes, le Jutra du meilleur film d'animation est allé à Jean-François Lévesque pour Le noeud cravate. La compétition était grande aussi du côté des courts et moyens métrages, mais finalement Denis Villeneuve l'a finalement emporté pour Next Floor, qui peut ajouter un Jutra aux 15 prix déjà obtenus dans le monde.

À l'issue de la soirée, Karine Vanasse, s'est félicitée du déroulement du gala, qu'elle animait pour la première fois. «Tout le monde s'attendait à ce que Tout est parfait ou d'autres films gagnent certains prix. Mais je crois que le fait que Tout est parfait soit sorti l'an dernier a aidé Polytechnique cette année, c'est certain», a estimé la jeune femme, qui n'hésiterait pas une seule seconde à reprendre du service pour le prochain gala. Avis aux intéressés...

 

Encore des Jutra

Quatre autres Jutra ont été remis hier:

> Meilleur documentaire: Sous la cagoule, un voyage au bout de la torture de Patricio Henriquez

> Meilleur film d'animation: Le noeud cravate de Jean-François Lévesque

> Meilleur court ou moyen métrage: Next Floor de Denis Villeneuve

> Jutra-Billet d'or (meilleur box-office): Cruising Bar 2 de Robert Ménard