Trois ans après Mon petit doigt m'a dit, André Dussollier se glisse de nouveau dans la peau du détective Bélisaire Beresford. Et retrouve pour l'occasion sa complice Catherine Frot, la précieuse Prudence...

André Dussollier aime bien l'esprit anglo-saxon. Au cinéma, il a parfois eu l'occasion d'interpréter les auteurs anglais, notamment dans les adaptations des pièces d'Alan Ayckbourn qu'a transposées Alain Resnais au grand écran.

«Il est vrai qu'il y a deux courants très distincts chez nous», a reconnu l'acteur au cours d'une interview accordée à La Presse en janvier lors des Rendez-vous du cinéma français à Paris. «Notre théâtre comporte un aspect très franco-français, pour ne pas dire franchouillard. Mais en même temps, nous sommes aussi très attirés vers le nord et les auteurs anglo-saxons. Personnellement, je me sens très à l'aise dans l'univers théâtral britannique. J'adore l'esprit des Anglais.»

Le vétéran réalisateur Pascal Thomas, à qui l'on doit notamment La dilettante (et aussi La pagaille avec Rémy Girard), s'est trouvé une passion pour l'oeuvre de l'auteure anglaise la plus lue dans le monde après Shakespeare. Le crime est notre affaire, à l'affiche vendredi, est en effet une transposition d'un roman d'Agatha Christie, comme l'étaient d'ailleurs ses deux films précédents, Mon petit doigt m'a dit (film toujours inédit au Québec) et L'heure zéro. Le plus récent opus reprend d'ailleurs les deux personnages principaux de Mon petit doigt m'a dit, Prudence et Bélisaire Beresford (Catherine Frot et André Dussollier), et les plonge dans une nouvelle intrigue policière.

«Voilà le genre de proposition qu'on accepte d'emblée! indique l'acteur. La perspective de retrouver Catherine et de lui donner la réplique dans un contexte comme celui-là est déjà très attirante. Ensuite, nous avons développé avec Pascal une fort belle complicité. Et surtout, il y a le plaisir de jouer dans un film original et singulier, qui ne ressemble à aucun autre. Il repose sur une intrigue policière, mais les personnages n'évoluent jamais dans le premier degré. Les polars modernes sont en général plus réalistes. Et beaucoup plus..., comment dire, brutaux!»

Selon l'acteur, l'originalité - et le succès - des films que Thomas a tiré des livres d'Agatha Christie (Mon petit doigt m'a dit et Le crime est notre affaire ont été de très grands succès publics en France) découle du travail d'adaptation.

«En fait, explique Dussollier, Pascal n'a gardé des livres que leur intrigue policière. Et il a su faire quelque chose d'inventif à partir d'ouvrages qui, il faut bien le dire, paraissent aujourd'hui désuets, inutilement explicatifs et bavards. Cela dit, il est parvenu à préserver l'esprit des romans en leur donnant d'abord une nouvelle modernité et, ensuite, en transposant l'intrigue en France avec des personnages de chez nous. Il en émane à mon avis un charme suranné très séduisant. Comme acteur, j'y prends en tout cas un plaisir fou!»

Au-delà du jeu


Bien qu'étant l'un des acteurs les plus appréciés au théâtre et au cinéma, André Dussollier estime que rien n'est jamais acquis.

«Le plaisir du jeu évolue, mais pas tant que cela, dit-il. Même si, au fil des ans, on en vient à travailler souvent avec les mêmes personnes au sein de «familles» de cinéma, chaque nouveau rôle, chaque nouveau personnage apporte son lot d'inquiétudes. En revanche, je dirais que l'aspect le plus stimulant de ce métier réside maintenant dans la variété, dans l'éventail des rôles qu'on vous offre. Mais rien n'est jamais gagné.»

Aussi l'acteur affirme exercer aujourd'hui son métier avec des motivations un peu différentes, même si l'appétit du jeu reste toujours le même.

«J'ai commencé très jeune, avant même l'adolescence. Un professeur avait détecté chez moi un certain talent pour l'art dramatique et m'avait orienté vers cela. À cet âge, on voit dans le jeu une possibilité de ressentir et d'exprimer par le truchement d'un personnage des choses que l'on ne pourrait évidemment pas exprimer de la même manière dans la vie. Comme une façon d'être un peu en avance, ou d'aller un peu plus loin dans la psychologie. C'est une libération mentale, intellectuelle et émotionnelle. Cela vous accompagne pendant toute votre carrière, mais au bout d'un moment, ce n'est plus suffisant.»

À l'instar de plusieurs collègues, l'acteur a ainsi monté quelques spectacles solos sur scène. Il espère venir se produire un jour chez nous.

«Aujourd'hui, j'ai envie d'aller chercher des textes qui me donnent l'impression de pouvoir en dire un peu plus. Je ne veux plus être dépendant du regard des autres seulement. C'est bien sûr flatteur d'être choisi par des metteurs en scène. Mais c'est aussi un peu limité.»

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Le crime est notre affaire prend l'affiche le 24 avril. Les frais de voyage ont été payés par Unifrance.