Sur le tapis rouge est arrivée la comédienne Shu Qi. C’est la question que tout le monde se posait: «C’est qui?» Les stars ne brillaient pas de tous leurs feux, aujourd’hui, pour l’ouverture du 62e Festival de Cannes. Pas de Brad Pitt, pas de Penélope Cruz, même pas de Johnny Hallyday, pourtant tous annoncés au Festival dans les prochains jours.

La raison est fort simple. Up, le film d’animation de Pixar qui ouvrait le Festival, ne compte pas de vedettes, si l’on fait exception de Charles Aznavour, qui prête sa voix à la version française du film. C’est lui qui a fermé la première montée des marches. Et c’est lui que les centaines de badauds, massés le long de la Croisette, ont le plus applaudi.

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«Je ne reconnais personne!» a dit une dame à son amie. «Mais si, il y a Jean Rochefort!» Il y avait aussi Charlotte Gainsbourg, Claude Lelouch, Tilda Swinton, Agnès Varda, Elsa Zylberstein, Elizabeth Banks, Isabelle Huppert et tous les membres du jury (dont Shu Qi). Mais peu de comédiens que les touristes néerlandais et américains ont pu reconnaître.

«Comment elle s’appelle, celle-là, la Mexicaine?» a demandé ma voisine à son chum. «Ah oui! C’est Salma Hayek!» C’était Aishwarya Ray, l’égérie de L’Oréal…

Certains, qui attendaient Éric Cantona ou Gérard Depardieu sont rentrés penauds, des ballons colorés du film d’ouverture, Up, du studio Pixar, à la main.

Une «petite» soirée d’ouverture pour Cannes (selon ses propres habitudes), mais une grande première pour Pixar. Alors que le concurrent DreamWorks est un habitué de la Croisette (Shrek, Kung-Fu Panda, etc.), le studio de l’excentrique John Lasseter (Toy Story, Ratatouille, Wall-E) en était à ses premiers pas sur le tapis rouge.

Peut-être pour excuser cette invitation tardive, le délégué général Thierry Frémaux, guilleret avant la projection de presse du matin, a proposé à Pixar d’ouvrir le Festival. Up, réalisé par Pete Docter, est non seulement le premier film d’animation, mais aussi le premier film en 3D à faire l’ouverture de Cannes.

Un film amusant pour une ouverture qui se voulait tout aussi ludique. Up est l’histoire d’un vieux grincheux de 78 ans, Carl Fredricksen, vendeur de ballons à la retraite, qui gonfle assez de ballons à l’hélium pour voir sa maison s’envoler jusqu’en Amérique du Sud - et ainsi remplir une promesse faite jadis à son épouse disparue.

Carl est accompagné bien malgré lui par un jeune scout irritant, Russell, qui l’entraîne de mésaventure en mésaventure, pour le meilleur et pour le pire. Comme tous les films de Pixar, Up est admirablement bien filmé, ingénieux, comique et par moments émouvant. Mais l’intrigue est mince, le scénario assez conventionnel et l’animation en relief, pourtant parfaitement maîtrisée, en manque de punch.

Pete Docter, qui a fait ses débuts comme scénariste chez Pixar avec Toy Story, avant d’y réaliser Monsters, Inc., a obtenu un Oscar grâce à sa collaboration au scénario de Wall-E. Up n’est malheureusement pas du calibre de Wall-E ou de Toy Story. Mais ce 10e film de Pixar reste un «produit certifié de qualité», mis au point pendant près de cinq ans par une équipe de 60 animateurs.

Un produit qui fait d’ailleurs craindre le pire à Disney, propriétaire de Pixar depuis trois ans. Est-ce que les enfants et leurs parents, le public-cible du studio, seront intéressés par l’aventure d’un vieillard bougon qui fait voler sa maison au Vénézuela avec des ballons? Difficile à dire… John Lasseter, le président de Pixar et réalisateur de Toy Story et Toy Story 2 - qui reprendront l’affiche en format 3D à l’automne avant de connaître une suite en 2010 - ne s’en fait pas outre mesure. «Pixar est un studio dirigé par ses créateurs, a-t-il répété en conférence de presse. Walt Disney disait: «Pour chaque rire, il doit y avoir une larme.» Je crois que ce film est fidèle à ce principe.» Lasseter, qui supervise désormais la production de Disney en plus de celle de Pixar, défend aussi l’utilisation réservée dans Up de la technologie 3D, que vient de redécouvrir Hollywood (et qui est autrement plus au point que son ancêtre des années 80).

«On pense toujours d’abord au public. On veut capter son attention. Mais le 3D distrait souvent les gens de l’histoire, par des effets tape-à-l’oeil. Je trouve au contraire qu’il faut se servir du 3D pour garder l’intérêt du spectateur. Le potentiel du 3D est très excitant. Tous nos films d’animation, chez Pixar comme chez Disney, seront désormais créés en 3D».