Le nom d'Isabelle Huppert est intimement lié à l'histoire du Festival de Cannes. À plusieurs reprises, elle y a accompagné des films en compétition officielle, parfois deux la même année (en 1980, Sauve qui peut la vie, de Godard, et Loulou, de Pialat). Deux fois aussi, elle a remporté un prix d'interprétation féminine (Violette Nozière en 1978, et La pianiste en 2001).

Après avoir été membre du jury en 1984 (l'année de la Palme d'or remise à Paris, Texas, de Wim Wenders), on la retrouve cette année présidente de ce clan sélect, la première femme à assurer ce rôle depuis Isabelle Adjani, il y a 12 ans.

En conférence de presse, hier, flanquée des huit membres de son jury - Asia Argento, Nuri Bilge Ceylan, Hanif Kureishi, Robin Wright Penn, Shu Qi, James Gray, Sharmila Tagore et Lee Chang-Dong -, madame la présidente a joué la carte de la prudence, après avoir été invitée à élaborer sur la façon dont elle et ses adjoints jugeront les 20 films de la compétition officielle.

Comme c'est souvent le cas, ce jeu des questions-réponses avec la presse n'a pas donné lieu à de grandes déclarations. S'il y a un moment cannois qui donne dans le cliché et la formule creuse, c'est bien cette rencontre de presse. Vivement un Tarantino ou un Benigni pour mettre un peu de pep...

 

«Nous ne sommes pas ici pour juger les films, mais pour les aimer, a repris machinalement l'actrice fétiche de Claude Chabrol. C'est toujours difficile d'expliquer pourquoi on aime quelque chose. C'est un débat vieux comme le monde. Mais je crois qu'il faut aller au-delà de son jugement premier. Un film, ce n'est pas seulement de l'émotion, c'est aussi de la réflexion.»

D'ailleurs, elle croit qu'il s'agirait d'une «bonne idée» de revoir un film qui a fait dissension au sein du jury. «Toute l'histoire du Festival est faite d'oeuvres qui n'ont pas été appréciées à leur juste valeur au moment où elles ont été montrées. Nous sommes ce que nous sommes et nous ferons ce que nous pourrons.»

Débats et diplomatie

À première vue, la rousse comédienne n'entrevoit aucun problème à débattre avec ses pairs pour l'élaboration du palmarès final, peu importe leur nationalité. «La diplomatie est un mot qui m'inspire beaucoup. Nous ne sommes pas au ministère des Affaires étrangères, mais dans un festival de cinéma...»

Quant à la composition de son jury, moitié féminin, moitié masculin, Isabelle Huppert croit qu'il faut éviter de donner dans la classification outrancière. «Comme dans toutes formes d'expression, il y a des réalisateurs masculins capables d'exprimer leur féminité, et d'autre part, des femmes cinéastes qui ont quelque chose de plus masculin.»