En Grande-Bretagne, David Yates est un cinéaste célèbre, surtout grâce à ses séries télévisées, Sex Traffic et State of Play (récemment adapté au grand écran par Kevin McDonald avec Ben Affleck et Russell Crowe).

De la série hyper-réaliste, socio-politique, quasi-documentaire, au long métrage de fiction fantastique, avec sorcellerie et effets spéciaux, la métamorphose de David Yates en a étonné plus d'un... Un choix assumé et confirmé puisqu'après avoir réalisé Harry Potter et l'Ordre du Phénix, le réalisateur britannique a accepté de tourner le sixième volet de la saga de J.K. Rowling: Harry Potter et le Prince de Sang-Mêlé, qui prendra l'affiche mercredi.

Fidèle comme toujours à l'esprit des romans de J.K. Rowling, ce nouvel opus agit comme le plus puissant des charmes, selon une recette décidément parfaite, déjà testée et éprouvée à cinq reprises.

Été orageux à Londres. La capitale subit une attaque des partisans du mage noir Voldemort, les redoutables «Mangemorts»... Parmi eux, Bellatrix Lestrange (Helena Bonham-Carter), la meurtrière du parrain de Harry, ainsi que Fenrir Greyback (Dave Legeno), un loup-garou assoiffé de sang.

Leur folie destructrice déferle sur la ville, terrifiant à la fois «Moldus» et sorciers. Pendant ce temps, Harry Potter (Dan Radcliffe) passe ses journées dans le métro londonien à lire La Gazette du Sorcier et à rêver aux filles. Face au danger, le professeur Albus Dumbledore (Michael Gambon) vient le chercher au coeur de la ville pour le mettre en sécurité chez les Weasley. Sur place, Ron (Rupert Grint), Hermione (Emma Watson) et Ginny (Bonnie Wright) l'attendent pour partir à l'école.

Mais l'étau démoniaque de Voldemort se resserre sur le monde de la sorcellerie. Poudlard n'est plus un havre de paix; le danger rôde dans l'enceinte même du château. Apparemment las et affaibli, Dumbledore cherche à préparer Harry à ses responsabilités d'adulte, à l'ultime combat contre le maître du Mal. Ensemble, le vieux maître et le jeune sorcier vont tenter de percer à jour les secrets de Voldemort alias Tom Riddle. Pour cela, Harry doit à tout prix amadouer le nouveau professeur des potions, car Horace Slughorn (Jim Broadbent) détient une information vitale sur celui qui a été autrefois son élève favori...

Et puis, il y a cet autre «mal» qui met le feu à Poudlard: le mal d'amour... Romilda Vane concocte des philtres d'amour pour ravir le coeur de Harry. Mais le jeune sorcier est de plus en plus attiré par Ginny, la soeur de son meilleur ami. Lavande Brown, elle, a jeté son dévolu sur son «Ron-Ron» qui l'adore puis cherche à s'en débarrasser par tous les moyens. Rongée par la jalousie, Hermione veut cacher ses sentiments coûte que coûte, mais n'y arrive pas toujours.

Seul Draco Malfoy (Tom Felton) reste insensible aux sirènes de l'amour: tapi dans l'ombre, protégé par le professeur Rogue (Alan Rickman), il complote pour mener à bien une mystérieuse mission, jusqu'à la terrible tragédie qui frappera bientôt le monde des magiciens...

Entre potions magiques et passions adolescentes à Poudlard, plongée dans le passé et poursuite du puissant Voldemort, Harry Potter et le Prince de Sang-Mêlé s'adresse à un public qui a mûri en même temps que ses trois héros.

Doté de traits d'humour et d'interludes joyeux à l'école de sorciers, le film illustre à merveille le quotidien de Harry Potter et compagnie. En même temps, il mène ses spectateurs toujours plus loin dans l'univers maléfique de Voldemort. Parmi ses plus belles réussites: la vision des rues de Londres, filmée comme à bord d'un balai magique (technologie IMAX 3D), les «Mangemorts» qui s'évaporent et se dématérialisent sous forme de fumée noire, ou encore la caverne de Voldemort, une superbe création entièrement numérique.

Effets spéciaux, décors, costumes: tout participe à créer la magie Harry Potter, réhaussée par le talent du directeur photo, Bruno Delbonnel (Le fabuleux destin d'Amélie Poulain). Seule déception: la scène d'action finale, particulièrement longue et excitante dans le livre, a été réduite à une brève confontation peu rythmée dans la tour de Poudlard...

Côté acteurs, à 20 ans, Daniel Radcliffe est encore mignon mais empreint d'une nouvelle maturité, tout comme sa partenaire Emma Watson. La surprise du film vient toutefois de leur acolyte Rupert Grint: durant des années, il a fait preuve d'un sens de la comédie assez approximatif, plus proche de la grimace que du jeu d'acteur. Mais sorti de sa dégaine d'adolescent balourd, le jeune homme a pris de la carrure, offrant une performance comique aussi convaincante que cocasse. Et si Gary Oldman et Emma Thompson ne sont plus là, la présence de Jim Broadbent est toujours un plaisir, tout comme celle de Helena Bonham Carter, effarante en «Mangemort».

Malgré les contraintes de la superproduction et de la franchise mondiale, David Yates semble avoir pris goût à l'aventure puisqu'il s'est déjà attelé à la réalisation du septième et l'ultime volet de la saga de J.K. Rowling. Harry Potter et les reliques de la mort fera l'objet de deux films distincts: sorties prévues en 2010 et 2011... Bref, la mécanique est parfaitement huilée: alors que les spectateurs découvrent l'adaptation sur grand écran du sixième volume, l'équipe du film, elle, s'apprête déjà à mettre un point final aux aventures cinématographiques de Harry Potter.