Montréalais d'origine, Arthur Smith a trouvé sa vocation de producteur à Hollywood. Il travaille ces jours-ci sur une quinzaine d'émissions de télé, dont Hell's Kitchen, avec le chef Gordon Ramsay, qui en est à sa sixième saison cet été. Et il rêve de faire bientôt du cinéma...

Dans le garage de sa maison de Beverly Hills, Arthur Smith a une paire de patins à glace et un équipement de hockey.

«Je ne l'utilise pas souvent, mais je suis incapable de m'en départir, dit-il, l'air embarrassé. Il faut croire que ça fait partie de ma vie.»

L'équipement de hockey n'est pas le seul témoignage de l'intérêt que M. Smith, l'un des producteurs d'émissions de télé les plus demandés à Hollywood, porte au sport.

Deux gilets de hockey - l'un autographié par Wayne Gretzky, l'autre par Mario Lemieux -, sont affichés dans son salon, près d'une rondelle autographiée par Maurice Richard. Plus loin sont posés un casque de football ayant appartenu à Joe Montana et un gant de boxe signé par Muhammad Ali.

Ce sont là des souvenirs du temps où M. Smith faisait carrière à titre de producteur d'émissions sportives, carrière qui a commencé dans les couloirs de CBC, à Toronto, au début des années 80.

«J'ai toujours été intéressé par le sport», explique Smith, assis dans un fauteuil de sa cour, près d'une grande piscine où il ne se baigne pratiquement jamais, faute de temps.

«Mais, en même temps, j'ai toujours voulu viser plus large. Trouver des façons d'appliquer les méthodes du sport - la vitesse, l'adrénaline, la victoire et la défaite - aux autres types d'émissions de télévision.»

Aujourd'hui, M. Smith, qui a grandi à Saint-Laurent et à Hampstead, produit une quinzaine d'émissions, dont Hell's Kitchen, sur Fox, avec le chef Gordon Ramsay. Il produit aussi la deuxième saison de I Survived a Japanese Game Show, une émission diffusée au réseau ABC où des participants tentent de remporter le grand prix aux jeux télévisés étranges produits au Japon. I Survived vient de remporter la Rose d'or de la meilleure émission de télé, un prix annuel décerné en Suisse.

Sans rendez-vous

Arthur Smith a commencé à travailler dans le milieu de la télé à 22 ans, quand il habitait à Toronto et étudiait à l'Université Ryerson. En regardant le générique à la fin d'une émission de sports à CBC, il voit le nom du producteur exécutif Jim Thompson et décide d'aller le rencontrer. Sans rendez-vous.

«Je suis resté à l'extérieur de son bureau tellement longtemps qu'il a fini par sortir, raconte Smith. Je l'ai persuadé de m'accorder cinq minutes. Finalement, nous avons parlé durant une heure et demie.»

Plus tard cet été-là, la direction des sports à CBC lui fait une offre. «Ils ne savaient pas où me mettre, alors ils ont créé un poste pour moi», se souvient-il.

Les patrons ont dû être contents de leur choix: en 1984, Arthur Smith est nommé producteur pour la couverture des Jeux olympiques de Los Angeles, puis ceux de Séoul en 1988.

«Mon défi, ça a toujours été d'essayer d'amener plus de gens à écouter les sports. Par exemple, les présentateurs avaient des vestons orange. J'ai enlevé ça. J'ai aussi mis plus de rythme dans l'émission, plus de musique. C'était une petite révolution à CBC dans ce temps-là.»

À 28 ans, il est nommé à la tête de la division des sports de CBC. Son travail est remarqué. Les offres commencent à affluer. NBC veut le rencontrer. CBS également. Arthur Smith choisit plutôt de prendre un avion pour L.A. afin d'aller y rencontrer le légendaire producteur Dick Clark. Les deux hommes décident de travailler ensemble. Arthur Smith s'installe donc à Hollywood.

Smith a alors produit des émissions pour ABC, NBC, FOX et CBS. Mais chaque fois, la contrainte de travailler pour une multinationale lui pesait. «J'entrais dans les réunions, et tout le monde était en complet-cravate, alors que j'étais en jeans et en t-shirt. Je n'ai jamais compris la culture corporative. Ce n'était pas pour moi.»

En 2000, il décide de fonder sa propre boîte, A. Smith&Co. Productions. Il a vite vendu des concepts à 25 chaînes de télé, dont Fox, à qui il fournit la majeure partie des émissions de téléréalité diffusées par la chaîne. «J'aime quand la télé nous fait ressentir une émotion forte, dit-il. J'aime quand il y a un risque. C'est à ce moment que le médium est le plus fort, à mon avis.»

Émission phare

Aujourd'hui, son émission phare est Hell's Kitchen, où les participants tentent d'impressionner le chef Gordon Ramsay pour éviter l'élimination. L'émission, qui en est à sa sixième saison et qui a été en nomination pour un prix Emmy, est filmée dans un restaurant-studio construit sur mesure à Culver City, près de L.A. Le plateau de tournage compte 82 caméras.

«Le plus drôle, c'est que je n'aime pas vraiment la cuisine, dit Smith. Pourvu que ce soit mangeable, je suis content.»

M. Smith dit être un fou de télé. Il regarde de tout, à toute heure de la journée ou de la nuit. Quand un employé du câble est venu chez lui récemment pour installer un nouveau système et lui a demandé où il devait mettre le câble, M. Smith lui a montré son avant-bras. «Ici, a-t-il dit. Tu peux le brancher directement dans mon bras. Ça faciliterait ma vie.»

D'ici quelques années, il aimerait se mettre à la production de films. Lui et des associés viennent d'acheter les droits de l'histoire de Cupcake Brown, une ex-membre de gangs qui a vécu une vie de crimes et de drogues, avant de frôler la mort et décider de devenir avocate. Aujourd'hui sobre, elle vient de publier l'histoire de sa vie, A Piece of Cake: A Memoir. «C'est une histoire unique, dit-il. Impossible à oublier. J'aimerais faire un film. L'important est que ça soit captivant. Et que ça touche les gens.»