Drew Barrymore derrière la caméra? Elle en rêvait. C'est chose faite avec Whip It, un film de filles fait par des filles et destiné aux filles. Ici, le «girl power» déboule sur les pistes de roller derby alors qu'Ellen Page, qu'on a connue sous le nom de Juno, devient Bliss Cavendar... dite Babe Ruthless. Rencontre avec une drôle de dame.

C'était à Los Angeles, l'hiver dernier, lors de la conférence de presse tenue à quelques jours de la sortie de He's Just Not That Into You. Drew Barrymore, qui y tenait un rôle et agissait comme productrice, était vêtue d'une robe bleu poudre, ses cheveux étaient gonflés et laqués, ses faux cils très... faux. Bref, elle semblait sortir d'un épisode de Mad Men.

À Toronto, où elle venait présenter Whip It, sa première réalisation, elle s'est présentée devant les journalistes moulée de gris, fines bretelles roses tombant sur les hanches, noeud papillon sur cou nu, cheveux blonds et lisses frangés de noir.

Drew Barrymore aime être elle. Pas de manière prétentieuse mais de façon ludique. Il y a quelque chose du «jeu» et non du «je» dans sa manière de se présenter. Comme si la petite fille de E.T. n'avait pas vraiment grandi et prenait encore plaisir à se déguiser pour... les invités. Mais attention: ce côté enfantin n'est que d'apparence. C'est avec sérieux que la jeune dame approche son métier. Ou plutôt ses métiers.

Elle a grandi devant les caméras. Elle produit depuis plus de 15 ans. «Le but ultime était de réaliser, a-t-elle indiqué. Cette expérience m'a changée à jamais, il n'y a pas de marche arrière possible. J'ai hâte au prochain projet que je réaliserai. J'ai fait une cinquantaine de films et, honnêtement, ce tournage a été le plus exceptionnel, le plus enrichissant, le plus inspirant auquel j'ai jamais participé.»

Basé sur le roman partiellement autobiographique de Shauna Cross, membre de l'équipe des Los Angeles Derby Dolls connue sous le nom de Maggie Mayhem, Whip It est l'histoire de Bliss Cavendar (Ellen Page), adolescente qui se cherche ailleurs que sur la voie que sa mère (Marcia Gay Harden) lui a tracée - et qui est celle des concours de beauté. Elle rencontre un jour, par hasard, les membres d'une équipe de roller derby. Coup de foudre pour le sport et la flamboyance de celles qui le pratiquent. Quelques mensonges plus tard, Bliss parvient à se faire admettre dans l'équipe, où elle devient Babe Ruthless.

«Dans ce sport-là, on a la «permission» d'être athlétique et drôle. Les looks et les noms qu'on prend nous permettent de jouer un rôle, de nous prendre pour des dures à cuire. Sur la piste, on veut tuer les adversaires. Une fois la partie terminée, on les aime», raconte Shauna Cross, qui a scénarisé son roman avec Drew Barrymore. «J'ai passé beaucoup de temps avec Shauna, confirme cette dernière, afin d'apporter mes expériences personnelles au récit. J'ai plongé dans mes souvenirs, je me suis rappelé cette époque où l'on cherche sa «tribu» et où on a l'impression de ne pas aller dans l'espace qui nous a été «attribué».»

Femmes d'expérience

Drew Barrymore s'est aussi attardée à la relation mère-fille qui pousse Bliss à quitter le cocon familial. Facile, pour elle, de comprendre combien la pression familiale peut être lourde sur les épaules d'une jeune personne en train de se forger sa propre identité. En cela, elle s'est pleinement identifiée au personnage qu'incarne Ellen Page. À qui elle a proposé le rôle avant que la jeune actrice canadienne ne tourne Juno.

«Ç'a été un bonheur de la suivre à travers tout ce qui a suivi la sortie de ce film, poursuit Drew Barrymore. Ellen est une des actrices les plus talentueuses de la planète, elle est jeune, mais en même temps, brillante. C'est une vieille âme, quoi. Et ça servait le personnage: Bliss est la petite nouvelle dans l'équipe et elle doit prendre sa place, un peu comme Ellen dans le milieu du cinéma.»

D'autant plus qu'elle s'est retrouvée à la tête d'une distribution comptant son lot de femmes d'expérience: Marcia Gay Harden, Kristen Wiig, Juliette Lewis, Zoë Bell, et... Drew Barrymore. «Quand on travaillait le scénario, on faisait comme si Drew ne serait pas devant la caméra, raconte Shauna Cross. Puis, un jour, elle m'a dit: «O.K., on arrête de faire semblant. On sait toutes les deux que je vais jouer Smashley».» Une joueuse pleine de bonne volonté mais malchanceuse, qui voit ses efforts «récompensés» par de multiples blessures.

«Il y a eu un temps où le roller derby a été truqué, mais ce n'est plus le cas aujourd'hui», assure Drew Barrymore qui apprécie de ce sport qu'il permette à des femmes «de tout âge, taille, race, statut économique» de chausser les patins à roulettes et de s'affronter. Oui, l'activité n'est pas sans danger. La mettre en scène non plus. Surtout quand on refuse de jouer la carte du «faire semblant»: «Je voulais le moins possible faire appel à des cascadeuses. Les gens ne sont pas bêtes et auraient compris immédiatement si je n'avais filmé les actrices qu'en gros plans, pendant les parties.»

Pour parvenir à être crédibles dans leurs personnages, les filles ont donc fait quatre heures de patinage par jour pendant un mois. «Et nous avons porté nos bleus comme des médailles», conclut Drew Barrymore, toute fière de son coup. La gamine était de retour.

Whip It (Ça roule!) prend l'affiche le 2 octobre.