La demande d'extradition de Roman Polanski présentée formellement jeudi soir par les États-Unis aux autorités suisses pour une affaire de moeurs vieille de plus de 30 ans met une pression supplémentaire sur le cinéaste franco-polonais qui, selon la Suisse, risque une peine maximale de deux ans. Le réalisateur a annoncé aussitôt qu'il s'opposerait à son extradition.

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«Le 22 octobre 2009, l'Ambassade des États-Unis à Berne a adressé une demande formelle d'extradition à l'OFJ (Office fédéral de la justice), respectant ainsi le délai de 40 jours prévu dans le traité d'extradition conclu entre les États-Unis et la Suisse», a indiqué vendredi l'OFJ dans un communiqué.

La réponse de Roman Polanski ne s'est pas fait attendre: «M. Polanski ne change pas de cap. Il n'acceptera pas la demande d'extradition des États-Unis».

Réclamé par la justice américaine qui lui reproche des «relations sexuelles» avec une mineure de 13 ans, le cinéaste risque une peine maximale de deux ans, a assuré à l'AFP un responsable de l'OFJ, Folco Galli.

Âgé de 76 ans, Roman Polanski bénéficie d'une nouvelle loi plus clémente du 1er juillet 1977 car, bien que le «délit ait eu lieu avant le 1er juillet 1977, la cour n'a pas prononcé la peine», selon M. Galli.

En détention depuis son arrivée en Suisse le 26 septembre alors qu'il se rendait à un festival de cinéma, Roman Polanski aura l'opportunité de faire valoir ses arguments auprès des autorités suisses, une fois que l'OFJ aura transmis la demande d'extradition au canton de Zurich, lieu de détention du cinéaste.

«Un délai lui sera fixé pour faire valoir ses observations à cette demande d'extradition», explique le communiqué. «Roman Polanski peut demander une prolongation de ce délai», a précisé le responsable du ministère de la justice suisse.

«Les autorités zurichoises seront chargées de l'audition de Roman Polanski. Elles établiront un procès verbal qui nous sera transmis», a ajouté M. Galli.

Et c'est sur la base de la demande d'extradition et des observations de Roman Polanski que l'OFJ «décidera s'il convient d'accorder ou non son extradition aux États-Unis».

Une fois encore, rien ne sera joué. Car un recours pourra être présenté par le cinéaste contre la décision de l'Office fédéral de la justice auprès du Tribunal pénal fédéral de Bellinzone et, en dernière instance, auprès du Tribunal fédéral de Lausanne.

«Roman Polanski pourra faire appel de la décision de l'OFJ auprès du Tribunal pénal fédéral dans un délai de trente jours», a précisé M. Galli.

Mais jusqu'ici les autorités suisses ont toujours été favorables aux positions américaines.

La justice suisse a encore rejeté mardi une demande de mise en liberté provisoire du réalisateur, confirmant ainsi un premier avis émis le 6 octobre par les autorités helvétiques qui avaient jugé «élevé» le risque de fuite du cinéaste vers la France, où il serait à l'abri d'une extradition grâce à sa nationalité française.

Mercredi, la Suisse a même reconnu avoir contacté elle-même les États-Unis après avoir eu connaissance de l'arrivée prévue en Suisse de Roman Polanski, pour leur demander si leur mandat d'extradition émis en 2005 était toujours valable.

Cette série de revers ne présage rien de bon pour le cinéaste, Oscar du meilleur réalisateur (2003) et Palme d'Or à Cannes (2002) pour Le Pianiste, en détention depuis près de trente jours en Suisse.