Ville frontalière située dans le nord du Mexique, Ciudad Juárez pourrait vouloir dire «là où les femmes disparaissent». Et c’est ce qu’illustre la réalisatrice Rachel-Alouki Labbé dans un documentaire intitulé Désert de croix, qui présente la réalité de ces femmes — et parfois de petites filles — vivant dans une région considérée comme «le berceau du féminicide mexicain».

Des disparitions. Des assassinats par milliers. Plus de 400 meurtres de femmes documentés. Et pourtant, aucun crime n’a été résolu depuis 1993. Voilà, le portrait que l’on dresse de Ciudad Juárez, une ville, située dans l’état de Chihuahua, où la corruption, le trafic de drogues et les enlèvements sont légion chaque jour sous un soleil brûlant, forçant souvent les gens à se barricader à la maison, par crainte de mettre le nez dehors. Là-bas, les disparitions de femmes font presque partie du quotidien. Les nombreuses photos des victimes placardées aux quatre coins de la ville en témoignent.

L’élément le plus marquant du documentaire demeure les témoignages émouvants des proches des disparues, qui, même après plusieurs mois gardent toujours espoir de les voir revenir. Pourtant, lorsque les familles demeurent sans nouvelles plus d’un mois, les chances de retrouver ces femmes sont plutôt minces…

Par ailleurs, l’oeuvre de Rachel-Alouki Labbé, qui a tourné auparavant Les enfants de la nuit dans le nord de l’Ouganda, écorche également au passage le gouvernement canadien qui a accepté la nomination récente de Francisco Javier Barrio Terrazas au poste d’ambassadeur du Mexique au Canada. Or, M. Barrio Terrazas a été gouverneur de l’état de Chihuahua entre 1992 et 1998. Pendant son mandat, le nombre d’assassinats aurait augmenté. De plus, celui-ci a déjà déclaré qu’il était «naturel» que ces femmes soient attaquées parce qu’elles fréquentaient des lieux obscurs et portaient des vêtements provocants.

Désert de croix sera présenté vendredi soir à 19h au cœur des sciences de l’Université du Québec à Montréal (UQAM) au 175, avenue Président-Kennedy. Avant la projection du film, un rassemblement aux flambeaux, en mémoire des femmes disparues, aura lieu à 17h45 à la place des Festivals. Une version télévisée du documentaire sera également diffusée le 11 janvier à 11h, midi et 20h, sur les ondes d’APTN.