Il est gros, fait des bruits étranges, a la peau couverte de pustules toxiques... mais surtout, le crapaud buffle envahit l'Australie à la vitesse de l'éclair, comme en témoigne un documentaire en 3D hilarant présenté au Festival de Sundance.

Le cinéaste australien Mark Lewis, qui s'était déjà illustré avec plusieurs documentaires animaliers déjantés (Le monde merveilleux des chiens, Rat), revient à Sundance dix ans après L'histoire naturelle des poulets.

Son film Cane Toads: The Conquest est présenté hors compétition au festival de cinéma indépendant, qui se tient jusqu'à dimanche à Parl City, dans les montagnes de l'Utah.

Mark Lewis avait déjà travaillé, il y a vingt ans, sur ces crapauds d'origine sud-américaine, introduits en Australie en 1935 pour exterminer les larves d'un parasite de la canne à sucre. Pour ses retrouvailles avec le sujet, il a utilisé les grands moyens et s'est lancé dans la 3D.

«Mon idée était de raconter l'histoire du point de vue du crapaud, et je trouvais que la 3D nous permettait de nous rapprocher énormément de l'animal et de donner une vraie perspective à sa conquête», explique Mark Lewis à l'AFP.

C'est un peu mon «Avacrapaud», ironise-t-il en référence à Avatar, la fresque en 3D de James Cameron devenue cette semaine le film le plus lucratif de l'histoire du cinéma, devant Titanic.

Pour illustrer l'avancée inexorable du «Bufo Marinus» en Australie - les 102 crapauds introduits dans le Queensland ont aujourd'hui une descendance de 1,5 milliard d'individus - Mark Lewis a délibérément choisi la comédie, même si certaines personnes dans le pays considèrent le crapaud comme une plaie.

«Il est gênant mais pas tant que ça», rassure le cinéaste. «C'est juste un sujet facile pour la presse, qui adore les termes «invasion» et «guerre»!».

«Mais d'un point de vue environnemental, ce n'est certainement pas le plus gros problème de l'Australie. On pourrait en trouver plein d'autres: la pêche intensive, la grand barrière de corail, les chameaux, les sangliers... Mais ce n'est pas très sexy», dit-il.

S'il n'est pas formidablement sexy non plus - «Attendez ! Regardez ses yeux, ils sont magnifiques, de vrais joyaux !», défend-il - le crapaud buffle a l'avantage de ne laisser personne indifférent.

«Tout le monde a une attitude et une perspective uniques sur le crapaud. Il suscite le sectarisme, la cruauté, le racisme, la compassion, l'amour... plein de choses», remarque Mark Lewis.

De fait, le documentaire offre une belle brochette de défenseurs et d'opposants, de cette femme qui a opté pour l'euthanasie des crapauds dans son congélateur - «C'est comme des vacances, un voyage gratuit en Alaska» - au propriétaire du «Crapaud show», qui a créé dans une caravane des mises en scène avec des batraciens naturalisés - dont une soirée dansante.

Sans oublier les cas avérés de chiens ayant développé une dépendance à l'animal, dont ils lèchent la peau pour plonger dans «un trip hallucinatoire de type LSD pour les humains», selon une chercheuse.

Mark Lewis, a clairement choisi le camp du «Bufo Marinus». «Le crapaud est un bon témoin de la stupidité humaine», dit-il.

De fait, un biologiste rappelle opportunément que le batracien était censé manger une larve qui se développe... tout en haut de la canne à sucre. «Or le crapaud n'est pas un grand grimpeur», ironise-t-il.

«C'est nous qui sommes à blâmer, pas les crapauds», ajoute Mark Lewis. «Et n'oublions pas que de toutes les espèces conquérantes, l'homme est la pire».