D'abord contesté, le nouveau système de mise en nomination des prix Jutra devrait faire consensus dans le milieu du cinéma québécois. Avec, comme favoris, les incontournables Polytechnique, J'ai tué ma mère et Dédé à travers les brumes, les mises en nominations, annoncées hier, ont aussi laissé place à quelques surprises parmi lesquelles 1981 et surtout Le jour avant le lendemain.

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Marie-Hélène Cousineau, la coréalisatrice avec Madeline Ivalu du Jour avant le lendemain, était émoustillée hier. Avec quatre mises en nomination dont celle du meilleur film et de la meilleure réalisation, Le jour avant le lendemain conclut une carrière entamée notamment au festival du film de Sundance l'an dernier.

«Même si le film a été présenté dans les festivals, on a toujours l'impression d'être perçu comme un film canadien et non comme un film québécois», déplore la réalisatrice. Coproduit par le Nunavut, le Nunavik et le Québec, le film a été distribué discrètement au Québec il y a un an. Plusieurs de nos interlocuteurs ont avoué ne jamais avoir entendu parler du film.

De façon plus attendue, Polytechnique, de Denis Villeneuve, et J'ai tué ma mère, de Xavier Dolan, jouaient du coude hier dans les catégories du meilleur film et de la meilleure réalisation. Une reconnaissance «locale ou nationale», selon Xavier Dolan, dont le nom apparaît dans quatre des cinq nominations de J'ai tué ma mère. Ricardo Trogi et son 1981 sont aussi présents dans cinq catégories, dont celle du meilleur film et de la meilleure réalisation. Avec neuf nominations principalement «techniques», Grande Ourse est aussi l'un des films les plus cités de ces mises en nomination.

La course aux Jutra est dominée par Dédé à travers les brumes, de Jean-Philippe Duval. Le biopic sur Dédé Fortin est cité dans 10 catégories, dont celles du meilleur film, de la meilleure réalisation, du meilleur acteur et du meilleur scénario. Ironiquement, les plus dures critiques quant à la réforme des mises en nomination des Jutra venaient de l'un des producteurs de Dédé, Roger Frappier.

«Avec 10 nominations, je peux dire que j'adore ce nouveau système finalement», plaisantait l'associé de M. Frappier, Luc Vandal. Est-ce qu'on en aurait eu moins avec le vote des pairs? Je ne sais pas: peut-être que cela nous a favorisés. Je trouve ça assez juste, même si aucun système n'est parfait.»

Le jury, composé de personnalités et de représentants des associations professionnelles du cinéma, a donc laissé une place moindre à Bernard Émond. Son dernier film, La donation, doit se contenter de trois nominations: meilleur scénario, meilleure actrice, meilleure direction photo. Demain, de Maxime Giroux, Carcasses, de Denis Côté, Derrière moi, de Rafaël Ouellet et Lost Song, de Rodrigue Jean, ont été boudés par le jury.

Du côté commercial, le grand champion du box-office, la comédie De père en flic, d'Émile Gaudreault, est représenté par Michel Côté et Rémi Girard, tous deux en lice pour le prix du meilleur acteur et le prix du meilleur acteur de soutien. Une mince récolte qui n'irrite pas le réalisateur du film, Émile Gaudreault: «J'irai chercher ma Bobine d'or sans amertume», assure-t-il.

«Il y a beaucoup de films qui apparaissent dans les nominations. Elles ne mettent pas juste en relief le box-office, mais le cinéma», dit Denis Villeneuve. La refonte du système de mises en nomination était un «exercice nécessaire» pour que les «Oscars québécois» conservent leur légitimité, selon lui.

La remise des prix Jutra aura lieu le dimanche 28 mars. Patrice L'Écuyer animera la soirée, diffusée sur Radio-Canada.