Elle s'appelle Mia Wasikowska et elle n'a pas eu à chercher très loin pour trouver en elle le personnage titre d'Alice in Wonderland qu'elle interprète dans la relecture que Tim Burton fait des contes de Lewis Carroll. «Ça n'a pas été un problème pour moi de m'identifier à Alice parce que je viens d'un monde complètement différent de celui dans lequel je me suis retrouvée pour le tournage de ce grand film épique, en compagnie de gens bien établis», a indiqué la comédienne de 20 ans lors de l'entrevue qu'elle a accordée à La Presse, à Toronto.

Née à Canberra, en Australie, la comédienne (que l'on a découverte grâce à sa remarquable interprétation d'une gymnaste suicidaire dans la série In Treatment et que l'on a vue dans les longs métrages Defiance d'Edward Zwick et Amelia de Mira Nair) a en effet grandi dans une petite ville australienne où vivent encore ses parents et où elle retourne entre deux contrats.

Celle qui est aujourd'hui considérée comme l'une des jeunes actrices à suivre s'est retrouvée dans la peau d'Alice après s'être dit: «Pourquoi pas?» Elle avait entendu parler du projet de Tim Burton, elle savait que des auditions étaient en cours, elle a fait la sienne devant une caméra et l'a envoyée au réalisateur. Qui désirait que «son» Alice soit peu ou pas connue.

«Au mois de juillet 2008, j'ai reçu un coup de téléphone: on me demandait d'aller passer une audition devant lui, à Londres. Je l'ai fait... et j'en ai fait trois autres pas la suite», se souvient la jeune femme toute menue qui, avec sa chevelure blond-roux maintenant coupée court, son teint très pâle, son calme et sa fraîcheur, a quelque chose d'«elfique» - presque d'un autre monde, quoi.

Fan de Tim Burton

Ce projet, oui, elle y tenait. Pour plusieurs raisons.

D'abord, parce qu'elle a aimé le livre de Lewis Carroll et, surtout, l'interprétation qu'en a faite le réalisateur tchèque Jan Svankmajer. Sa mère, artiste visuelle d'origine polonaise, les a mis en contact très jeunes, son frère et elle, avec ce film d'animation troublant - à mille lieues de la version sortie en 1951 des studios d'oncle Walt.

Ensuite, parce qu'elle a aimé le scénario, dans lequel une Alice de 19 ans, obligée de prendre fiancé, retourne au pays des merveilles dont elle a tout oublié mais où tous se souviennent d'elle, de la Reine rouge (Helena Bonham Carter) à la Reine blanche (Anne Hathaway) en passant par le lapin blanc (Michael Sheen) et le Chapelier fou (Johnny Depp).

«Pour moi, Alice in Wonderland est l'histoire d'une jeune femme qui ne se sent pas à sa place dans sa vie, où beaucoup de gens - sa famille, ses amis, la société - attendent des choses d'elle. Elle se retrouve alors dans la position de se demander combien de son propre bonheur elle est prête à sacrifier pour les autres, jusqu'où elle est prête à aller pour être heureuse - au risque de décevoir ceux qu'elle aime.» Mia Wasikowska aime ce sous-texte du scénario.

Enfin, parce qu'elle est, depuis longtemps, une fan de Tim Burton - et, donc, de Johnny Depp. Travailler avec eux, dans les studios de Los Angeles et, pour les extérieurs, aux alentours de Plymouth et de Cornwall, en Angleterre, c'était grand. C'était bon. Pas toujours facile - «à cause du nombre de scènes sur écran vert, il n'y a pas grand-chose auquel se raccrocher en tant qu'acteur». Mais, en même temps, la joie. «Comment ne pas être heureuse quand on est aussi bien traitée et qu'on est entourée de gens aussi exceptionnels!»

Petit détour, ici, sur son rapport à Tim Burton, dont elle admire le travail depuis l'adolescence: «Ce langage visuel qu'il a créé, ces images qui sont ancrées dans ses sentiments à lui et que les gens parviennent à décrypter, et son humour... Ç'a été extraordinaire de travailler avec lui.» Avec lui et avec Johnny Depp. De l'acteur (qui a lui aussi commencé très jeune dans le métier), Mia Wasikowska retient le plaisir qu'il semble encore avoir quand il travaille et le fait «qu'il a une vie personnelle normale, qu'il est un père de famille avant tout».

Cet aspect terre-à-terre lui plaît, à elle qui semble avoir les pieds bien ancrés dans le sol. C'est un peu pour cela qu'elle a tourné le dos au ballet classique, qu'elle a pratiqué de 9 à 15 ans: cette «quête de perfection, toujours», l'interpellait de moins en moins. Comparativement à ce monde-là, celui du cinéma lui semble «rafraîchissant». C'est réciproque: elle apporte à ce milieu difficile quelque chose d'éminemment frais et nouveau. Le parcours de cette demoiselle est assurément à suivre.

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Alice in Wonderland (Alice au pays des merveilles) prend l'affiche le 5 mars. Les frais de voyage ont été payés par Walt Disney Pictures.