Après Le cèdre penché et Derrière moi, Rafaël Ouellet s’intéresse à nouveau à la solitude rurale des jeunes filles en fleurs. New Denmark, sélectionné à Karlovy Vary l’an dernier, poursuit cette délicate observation des drames silencieux de la jeunesse.

Le lien de parenté entre Le cèdre penché, Derrière moi et New Denmark est évident. Comme des frères (ou plutôt, des soeurs), ces trois longs métrages créés dans la spontanéité mettent en scène des jeunes filles endeuillées ou en perte d’innocence. Mieux: tous trois ont été tournés dans la région natale du réalisateur, dans le Bas-du-fleuve.

«Ils ont été faits presque en même temps en trois ans. Trois ans, c’est parfois le temps qu’il faut pour faire un film, répond Rafaël Ouellet. Je n’ai pas eu tant le temps d’évoluer tant que ça comme être humain entre les trois. J’assume cette continuité et j’aime aussi retrouver, chez un cinéaste, des thèmes et des idées.»

Dans New Denmark, Carla, 16 ans, passe l’été à chercher sa soeur, Maggie, qui s’est évaporée dans la nature. Comme les héroïnes du Cèdre penché, Carla trouvera dans la musique une façon, aussi, d’apaiser son deuil. Pour le réalisateur qui se destinait au rockumentaire, la musique n’a rien d’anodin, pas plus que celles des femmes.

«La musique fait partie de ma vie et ça a été mon gagne-pain, dit-il. J’ai aussi été entouré de filles toute ma jeunesse. Encore aujourd’hui, je compte plus d’amies filles que d’amis gars. Je trouve que j’ai un côté féminin assez fort. En plus, le rapport entre le réalisateur et l’actrice m’a toujours fasciné.»

New Denmark a aussi été tourné dans le lieu de prédilection du réalisateur: le village d’où il vient, dans le Bas-du-fleuve. «Montréal, on l’a vue sous tous les angles. Il faudrait que je montre un visage que je ne connais pas parce que je si parlais de ce que je connaissais, le monde des artistes, ce serait très banal», dit-il.

Aux côtés de réalisateurs comme Sébastien Pilote, attaché au Saguenay, ou Denis Côté, Rafaël Ouellet met en scène le Québec rural, loin du «pittoresque» dans lequel, selon lui, s’égarent souvent les productions montréalaises, une fois sorties du 514. «La campagne, c’est pas seulement comme on nous la montre à la télé. Le vrai monde, c’est pas juste ça», dit-il.

À Dégelis, les tournages de Rafaël Ouellet sont les bienvenus et les jeunes acteurs non professionnels qui apparaissent dans ses films se convertissent même, pour certains, au cinéma. «J’ai beaucoup de plaisir à leur faire découvrir du bon cinéma: Rosetta, Elephant, c’est vraiment plaisant. Ils sont bien ouverts», dit Ouellet.

C’est d’ailleurs avec ces adolescents que Rafaël Ouellet a tourné son dernier film, une docu-fiction consacré au dernier été des jeunes dans le village, avant qu’ils ne deviennent des cégepiens. Le film, toujours en montage, sera prêt l’an prochain.

Après les jeunes, Rafaël Ouellet s’intéressera aux camionneurs avec Camions, un film actuellement déposé en financement auprès des institutions publiques et que le réalisateur espère tourner en 2011.