Immense espoir pour le cinéma d'auteur à Montréal: le cinéma Parallèle pourrait renaître à eXcentris, a appris La Presse. Québec étudie la possibilité de subventionner l'acquisition des trois salles de l'édifice de Daniel Langlois et la construction de deux autres salles pour créer un complexe cinématographique de cinq salles toutes consacrées au cinéma d'auteur.

Le ministère de la Culture a confirmé à La Presse qu'une demande d'aide financière lui a été présentée en mars. Le projet supérieur à 10 millions de dollars prévoit la construction de deux nouvelles salles sur la propriété d'eXcentris, soit sur le terrain actuellement occupé par le jardin qui borde la rue Clark.

Il est né à la suite d'une série d'événements ayant débuté en janvier 2009 quand eXcentris a annoncé l'arrêt de la programmation régulière de ses cinémas. Le Parallèle se voyait obliger de déménager. Ses dirigeants ont donc conclu une entente avec la Société de développement Angus (SDA) pour créer un cinéma d'auteur sur le terrain de l'édicule de la station de métro Saint-Laurent.

En février dernier, une demande a été déposée à Québec pour financer le projet, mais il a été compromis par la décision de ne plus y accueillir les Ateliers de danse moderne LADMMI qui doivent s'établir désormais dans l'édifice Wilder. Parallèlement, Daniel Langlois avait fait savoir à Québec qu'il était prêt à céder les salles d'eXcentris. Après discussions, il a même évoqué la possibilité que le cinéma Parallèle achète les deux premiers étages d'eXcentris, soit les trois salles de cinéma, le déambulatoire, le restaurant, les cuisines et les locaux administratifs.

Pour que ce projet se réalise, il faut que Québec le subventionne car le cinéma Parallèle est un organisme à but non lucratif. Mais il n'y a pas de programme au Québec pour acquérir des cinémas ou les aménager, les cinémas étant rarement des OBNL. Il faudrait que la ministre Christine St-Pierre demande une dérogation au Conseil du Trésor.

«Le dossier suit son cours», a dit Annie Legruiec, porte-parole au Ministère, précisant que «des échanges entre le cinéma, le Ministère et la SODEC» ont lieu.

Selon nos informations, le président de la SODEC, François Macerola, aurait proposé de procéder à un prêt plutôt qu'à une subvention, puis de faire appel au privé. Le cinéma Parallèle ne serait pas favorable à cette approche jugée «commerciale».

Ni M. Macerola, ni la ministre, ni Daniel Langlois n'ont rappelé La Presse, hier. À la SDA, son PDG, Christian Yaccarini, dit que «ça fait plus d'un an qu'on travaille sur un projet, mais je préfère rester discret sur la teneur des discussions».

Au cinéma Parallèle, on ne veut faire aucun commentaire à cause d'une promesse exigée par le Ministère en mars.

«Tout le monde marche sur des oeufs, dit une source. Une chose est sûre, on n'est pas dans une logique d'un cinéma commercial, donc l'idée d'introduire du privé n'est pas bonne. Mais le cinéma indépendant a besoin d'une autre grande salle à Montréal, mis à part le cinéma Beaubien.»

Le président de K-Films Amérique, Louis Dussault, dit que le Regroupement des distributeurs indépendants de films du Québec, dont il est le porte-parole, publiera d'ici vendredi un communiqué.

«Il faut que les salles d'eXcentris puissent rouvrir, car la viabilité du cinéma d'auteur est en jeu, dit-il. Tout est parqué au cinéma Beaubien. C'est un achalandage inouï. Les films sortent les uns après les autres de l'affiche parce que les autres veulent rentrer. Ça n'a plus aucun sens.»

L'impact économique d'eXcentris est important, notamment pour les commerçants. Le président de la Société de développement du boulevard Saint-Laurent, Gordon Bernstein, dit qu'eXcentris est majeur pour le quartier.

«Ça amène une autre clientèle, dit-il. Ça donne un certain cachet à la rue, qu'on a perdu avec la fermeture des deux salles. C'est créateur d'emplois car les cinéphiles découvraient la rue et fréquentaient d'autres endroits. Maintenant tout est concentré au Quartier des spectacles.»