I'm Still Here, The Town et Black Swan n'ont en apparence rien en commun. Si ce n'est de nous présenter la face plus noire de la condition humaine.

Non. Le film de Casey Affleck ne répond pas vraiment à la question que tout le monde se pose. La décision qu'a prise Joaquin Phoenix d'abandonner complètement le métier d'acteur pour tenter de faire carrière en chanteur de hip-hop n'était-elle qu'un immense canular destiné à nourrir ce «documentaire»? Il y a évidemment du faux dans I'm Still Here. Certains passages ont d'évidence été mis en scène. Et quelques acteurs ont été embauchés pour incarner des personnages-clés (le père notamment).

Mais il y a aussi, on le soupçonne, du vrai. Beaucoup. Ou alors, Joaquin Phoenix est un acteur encore plus prodigieux qu'on ne l'aurait cru. Révéler au grand jour un tel comportement autodestructeur, documenter ainsi un suicide professionnel dont il aurait dû mal à se remettre même s'il était vraiment faux, indique en effet une souffrance intérieure qui ne peut être feinte.

I'm Still Here est difficile à regarder. Au cours de la première partie, souvent mal filmée et disposant d'une prise sonore déficiente, Casey Affleck, beau-frère du protagoniste, n'aligne que des scènes qui ne vont nulle part, au cours desquelles Phoenix affiche son désoeuvrement en compagnie de son entourage, tous des gens rémunérés. Et le parcours obligé à sa suite: l'annonce d'arrêter le cinéma pour se convertir en (médiocre) chanteur; l'infâme spectacle de Vegas; la fameuse interview de Letterman; le rejet de Diddy; la déchéance physique et morale qui en découle.

Au-delà du «gaspillage» d'un talent d'acteur exceptionnel, on s'inquiète carrément pour la santé mentale d'un homme aux prises avec les démons intérieurs qui le hantent. Franchement, c'est triste à voir.

Était-ce toutefois vraiment nécessaire d'étaler tout cela sur grand écran? Et si ce film n'est qu'un immense canular, qui sera le plus piégé au bout du compte?

I'm Still Here prend l'affiche à Montréal le 24 septembre.

Un autre Affleck

Ben, le frère de Casey, propose lui aussi un nouveau film ces jours-ci. Après avoir réalisé un long métrage de très belle tenue il y a quelques années (Gone Baby Gone), Affleck remet le couvert avec The Town, une adaptation du roman de Chuck Hogan Prince of Thieves. Campée à Boston, la ville natale du réalisateur, l'intrigue suit l'évolution d'un criminel spécialisé dans les vols de banques (Affleck), qui tente de se refaire une vie après un dernier gros coup. Il tombe aussi amoureux d'une femme (Rebecca Hall, toujours impeccable), employée d'une banque que le groupe de braqueurs dont il fait partie avait dû kidnapper après un vol où rien ne s'est déroulé comme prévu.

Ce n'est pas tant le récit qui fait de The Town un film intéressant. À ce chapitre, l'intrigue est plutôt prévisible et le dénouement à l'eau de rose verse dans le cliché hollywoodien. En revanche, Affleck capte bien l'esprit de sa ville et de ses habitants. La réalisation est aussi très solide, particulièrement dans les scènes d'action. Bonnes performances de Jeremy Renner (The Hurt Locker) dans le rôle d'un complice, disons, «intense», et de Jon Hamm (Mad Men) dans celui d'un agent spécial du FBI.

The Town prend l'affiche à Montréal le 17 septembre.

Danse fatale

La fin de la projection de Black Swan coïncidant avec l'heure de tombée de cette section du journal, je ne peux m'étendre très longuement sur le nouveau film de Darren Aronofsky (The Wrestler). Ce drame laisse toutefois une forte première impression, bien que l'insertion d'éléments d'horreur dans le monde de la danse classique ne produise pas toujours l'effet escompté. L'histoire de cette danseuse étoile ayant à aller explorer en elle les plus sombres aspects de son âme pour un rôle tend en effet parfois à verser un peu dans la surenchère. On retiendra surtout la beauté visuelle de l'ensemble, la qualité de réalisation (Aronofsky installe dès le départ un climat anxiogène et le maintient pendant tout le film), des scènes de danse admirablement filmées, de même que des performances remarquables de Natalie Portman, Mila Kunis et Vincent Cassel. Black Swan prendra l'affiche au mois de décembre. Nous aurons évidemment l'occasion d'y revenir.

Consultez notre dossier sur le Festival de Toronto 2010.