Bien que son rôle dans Incendies soit très dramatique, Lubna Azabal garde le souvenir d'un tournage très heureux, au cours duquel elle était entourée de gens magnifiques.

Au moment où La Presse l'a rencontrée, Lubna Azabal n'avait pas encore vu Incendies. L'actrice belge allait découvrir quelques heures plus tard le film de Denis Villeneuve lors de sa présentation en primeur mondiale à la Mostra de Venise.

«J'ai très hâte de voir ce film et, surtout, de découvrir les scènes dans lesquelles je ne suis pas!»

Après la projection, celle qui incarne Nawal, cette mère qui confie à ses enfants une mission après sa mort, avait du mal à contenir son émotion en s'adressant au public vénitien. Visiblement, le film qu'elle venait de voir était à la hauteur de ses espérances.

«J'ai prié jour et nuit pour obtenir ce rôle! a confié l'actrice en entrevue. Je ne connaissais rien de l'univers de Wajdi Mouawad, ni de celui de Denis Villeneuve. Mais dès que j'ai lu la pièce, il y avait comme une évidence. C'était comme si j'avais reçu une gifle. C'est au-delà de la tragédie grecque. J'éprouve rarement ce genre de sentiment. Puis, quand j'ai ensuite pu lire le scénario de Denis, l'effet fut exactement le même.»

Révélée grâce à Loin (André Téchiné) et Paradise Now (Hani Habu-Assad), Lubna Azabal a eu la chance de tourner dans plusieurs productions internationales mettant en valeur des langues qu'elle ne maîtrise pas obligatoirement. Ne parlant pas l'arabe dans la vie, l'actrice doit d'ailleurs faire appel à des coachs quand l'occasion se présente.

«Les Arabes palestiniens se sont bien foutus de ma gueule quand ils ont regardé Paradise Now, rappelle-t-elle en riant. Il paraît que je n'avais pas l'accent du tout! J'ai aussi dû apprendre mes répliques phonétiquement pour Incendies. Mais là n'était pas le plus grand défi.»

Heureuse d'être terrifiée

Parsemé de scènes très éprouvantes, le récit d'Incendies fait écho à un drame intime aussi lourd que prenant. L'actrice, lauréate il y a quelques années d'un prix d'interprétation au Festival de Mont-Tremblant grâce à 24 Mesures (Jalil Lespert), affirme pourtant avoir vécu un bonheur de tous les instants.

«Bien entendu, il faut rester bien concentré sur le plan psychologique pendant le tournage de ces scènes-là. Elles exigent beaucoup intérieurement mais je n'ai pas souffert car j'étais entourée de gens magnifiques. J'étais souvent terrifiée, surtout au début car on a commencé avec les scènes de prison, mais j'étais heureuse d'être terrifiée! J'ai tellement souhaité avoir ce rôle!»

L'actrice dit particulièrement apprécier le fait que le récit fasse écho à la force tranquille de femmes qui, malgré la rigidité du cadre culturel dans lequel elles évoluent, tentent de briser le cycle infernal de la colère et de la honte.

Depuis Incendies, Lubna Azabal a par ailleurs tourné sous la direction de Ralph Fiennes. L'acteur anglais signe sa première réalisation en portant du Shakespeare à l'écran. Dans Coriolanus, film de facture résolument moderne, Lubna Azabal donne la réplique à son metteur en scène, de même qu'à Gerard Butler et Vanessa Redgrave. L'actrice commence aussi ces jours-ci le tournage du nouveau film d'Ismaël Ferroukhi (Le grand voyage) avec Tahar Rahim (la révélation du Prophète) comme partenaire de jeu.

«J'ai la chance de ne pas être cantonnée à un seul type de rôle. Et ça, c'est grâce principalement aux films que j'ai pu tourner à l'étranger», conclut-elle.

Les frais de voyage ont été payés par Les Films Christal et les Films Séville.

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